Nekketsu Genesis Mazingelion

Chapitre 5 (4ème partie)

Toutes les routes menant à Tokyo 3 étaient désertes de toute circulation civile, l'alerte à l'attaque de l'Ange ayant été relayée le plus vite possible, mobilisant l'ensemble des ressources en communication disponibles. Cependant, le personnel militaire, lui, devait acheminer le plus vite vers Tokyo 3 afin de participer au combat visant à ralentir Shamshel (rares étaient ceux qui croyaient que l'armée conventionnelle suffirait pour stopper la créature), et pour prendre en charge la protection des civils. Une colonne de camions de la JSSDF, transportant du matériel et du personnel, progressait ainsi vers la ville, roulant au plus vite afin d'atteindre la ville sans croiser Shamshel.

Le problème était que l'armée était partie du principe que la créature passerait par les vallées qui environnaient Tokyo 3. Pas qu'elle prendrait des raccourcis en passant par le sommet des collines.

A la tête du convoi, le chauffeur du premier camion vit ainsi la masse de l'Ange surgir au-dessus de sa tête, et sur le point de l'écraser de tout son poids.

Pilant sur ses freins, le chauffeur fit faire une embardée à son véhicule en tentant cependant de garder le contrôle. A l'arrière du véhicule, les soldats qu'il transportait furent brutalement secoués en tous les sens, les plus à l'arrière devant même lutter pour éviter d'être jetés à l'extérieur. Derrière lui, les autres conducteurs avaient également été surpris par l'apparition surprise de Shamshel, et avaient commencé à imiter leur collègue. Pendant un instant, le premier chauffeur crut que malgré ses efforts, il ne pourrait réussir à éviter la titanesque masse de l'Ange, mais au dernier instant, Shamshel modifia légèrement sa trajectoire, s'éloignant de quelques mètres de la trajectoire du camion. Ce qui fut suffisant pour qu'ils évitent la destruction totale, mais n'empêcha pas le flanc du véhicule de percuter le corps de l'Ange. Ce dernier, n'ayant même pas remarqué la présence des humains, continuait à avancer, projetant alors le camion vers le côté de la route. Lorsque l'Ange quitta enfin la route, le camion s'était écrasé contre la glissière de sécurité, qui fut arrachée du macadam. Fort heureusement, déjà ralenti, le camion fut totalement stoppé par le choc final, et ne sortit dès lors pas de la route. Le pare-brise avait cependant explosé sous le choc, projetant des morceaux de verre au visage du chauffeur et du soldat qui était assis sur le siège passager, rajoutant plusieurs coupures et égratignures au choc causé par le crash. Sonnés, les deux soldats ne purent sortir du véhicule par leur propre moyen ; ils furent aidés par quelques soldats qu'ils transportaient et qui eux étaient sortis sans trop de blessures de l'accident. D'autres aidaient les collègues qui avaient été également blessés dans le choc.

Derrière eux, l'ordre de la colonne était brisé, plusieurs autres camions ayant dû accomplir un freinage d'urgence pour éviter de s'encastrer dans ceux qui les précédaient. Les soldats, cependant, réagissaient déjà à la situation, certains faisant le tour des véhicules pour connaître le nombre de blessés, d'autre se chargeant de contacter la NERV. D'autres enfin furent envoyés constater les dégâts causés par l'Ange.

Il était facile de suivre la trace de la créature : elle laissait derrière elle une piste de plusieurs mètres de largeur, signalant le passage de son corps massif. Mais le plus gênant était que son passage avait rendu le passage complètement impraticable pour la colonne. Déjà, d'énormes débris de roche et de troncs d'arbre jonchaient maintenant toute la route, formant autant d'obstacles incontournables pour les camions et le matériel de première urgence qu'ils transportaient ; ensuite, la route elle-même n'avait pas résistée au poids de la bête. Le macadam était par endroits complètement enfoncé, tandis qu'à d'autres de véritables stalagmites de béton s'étaient dressés, constituant une nouvelle barrière.

Les secours pour Tokyo 3 étaient complètement bloqués.


Shinji était en poste, à bord de l'Eva-01, attendant l'arrivée de Kouji. Son anxiété commençait à atteindre des sommets, l'anticipation du combat étant loin d'accroître ses capacités. Il voulait croire aux encouragements de Misato, il voulait croire en sa force... Mais le doute continuait à régner. Même si il s'était quand même plutôt bien débrouillé la fois précédente, il était difficile de dire à quoi il devait s'attendre cette fois-ci. L'Ange était physiquement différent de celui qu'il avait combattu, et la NERV était incapable de dire quelles étaient ses capacités.

Et bien sûr, il avait encore les accusations de Toji en tête. Le fait qu'il ne se battrait pas en zone habitée le rassurait un peu, mais le peu de confiance qu'il avait en lui souffrait de ce souvenir.

Mais heureusement, une autre certitude le poussait à rester. La fois précédente, lorsqu'il avait été envoyé, il se croyait seul, ce qui l'avait rendu vulnérable. Cette fois-ci, il savait qu'il pouvait vraiment compter sur quelqu'un pour l'aider dans son combat. Et partager son fardeau de défenseur de l'humanité avec quelqu'un d'aussi confiant que Kouji le poussait encore plus à se surpasser que n'importe quel encouragement qu'on pouvait lui adresser.

Un bruit d'arbre en train de s'abattre attira son attention. Il fit bouger l'Eva de façon à ce qu'il puisse voir la source du boucan... Et, rassuré, il vit surgir la masse imposante de Mazinger Z. Le robot se déplaçait avec l'aisance d'un être humain, et pourtant chacun de ses pas faisait trembler le sol et témoignait de la puissance que pourrait déployer la machine contre ses ennemis.

L'écran de communication de Shinji s'ouvrit, faisant apparaître le visage de Kouji. Shinji ne put s'empêcher de sourire en voyant la détermination qu'affichait son ami.

« - Alors, Shinji ? Demanda Kouji. Prêt à botter des fesses ?
- Je ne sais pas, dit Shinji le plus sérieusement du monde. Est-ce que cette chose a des fesses ?
- J'en sais rien, mais je trouverais bien quelque chose à lui botter ! »

Malgré son angoisse, Shinji dût se retenir pour ne pas rire. Kouji ne sembla pas le remarquer, étant donné qu'il changea immédiatement de sujet.

« - Désolé pour le retard, mais ta coloc a mis du temps à me laisser partir ! Bon sang, elle a peut-être un corps d'enfer, mais j'ai jamais vu une rabat-joie pareille !
- Je vous signale que le canal que vous employez est ouvert à tous, et que tout le monde, que ce soit à la NERV ou à l'Institut de Recherche Photonique, peut vous entendre, monsieur Kabuto... »

Shinji ne pouvait voir le visage de Kouji que par le biais de l'écran du communicateur, mais cela fut suffisant pour le faire éclater de rire lorsqu'il le vit se décomposer lorsque la voix de Misato résonna dans leurs cockpits.

A dire vrai, il y avait de nombreuses personnes que ce soit au centre de contrôle de la NERV ou de l'Institut qui réprimaient un éclat de rire. Bien évidemment la situation ennuyait très fortement la première intéressée.

« - Serait-ce trop te demander de te calmer et de te concentrer sur le combat, Shinji ? Dit Misato d'un ton qui ne cachait pas qu'elle était excédée.
- Désolé, madame Katsuragi... Dit Shinji en essuyant les larmes qui se formaient sur les coins de ses yeux et en essayant de se contrôler.
- Donc... Hum... Quel est le plan ? Demanda Kouji d'un air penaud.
- On ne sait rien de ce que peut faire l'Ange, aussi il va falloir que vous donniez tout ce que vous pouvez et ne lui laissiez pas le temps de pouvoir répliquer, dit Misato qui avait retrouvé sa contenance professionnelle. Kabuto, d'après les informations que nous a fourni le docteur Yumi, Mazinger Z est capable de l'attaquer à distance, donc ne vous retenez surtout pas : dès que vous l'avez en visuel, mettez la sauce.
- Affirmatif !
- Shinji, de ton côté, les armes de l'Eva ne sont pas encore terminées, donc il va falloir que tu te contentes du Prog-Knife. Pendant que Kouji l'attaquera à distance, tu effectueras une manoeuvre de contournement pour pouvoir l'attaquer au corps à corps. Compris ? »

Sur commande mentale de Shinji, l'un des ailerons qui se dressaient sur les épaules de l'Eva s'ouvrit, et un mécanisme fit sortir le Prog-Knife de son étui métallique. Shinji fit l'empoigner à l'Eva, et une fois la lame dans la main de la machine, tout le mécanisme de rangement se rétracta aussitôt. Maintenant que l'Eva était armée, Shinji avait perdu toute envie de rire. Il ne savait que trop que cela signifiait que la bataille allait bientôt démarrée.

« - Compris, dit Shinji, malgré ses dents qui commençaient à s'entrechoquer.
- Parfait. Contact dans deux minutes. Bonne chance. »

Les deux machines adoptèrent une posture de combat, leurs pilotes se préparant à l'impact.

Tous deux étaient prêts pour le carnage.

Chapitre 5 (5ème partie)

« Docteur Yumi ? Le professeur Akagi voudrait vous parler. »

Le chef de l'Institut faillit sursauter lorsque l'un de ses employés l'informa de l'appel. La tension était si dense dans le centre de commandes que l'on aurait pu la couper au couteau, et le scientifique était très loin d'être le dernier à en ressentir les effets. Il était si concentré sur ce qu'il pouvait observer par le biais des écrans de contrôle qu'il n'avait pas vu s'approcher l'homme.

« - Oh. Très bien, passez la moi sur mon communicateur personnel.
- Tout de suite, monsieur. »

Le subalterne partit transmettre l'ordre du docteur Yumi, lequel partit rejoindre le poste surplombant le reste de la pièce et qui lui avait été attribué en tant que directeur des opérations depuis la mort du professeur Kabuto. Il se demandait bien ce que lui voulait sa collègue. Il ne l'avait jamais rencontré auparavant, même pas entendu parler, mais il avait juste eu connaissance de ses nombreuses contributions scientifiques, notamment dans le domaine de l'étude de l'AT-Field qui avait permis au projet Evangelion d'être mené à bien. Il s'agissait sans doute de lui fournir quelques informations sur Mazinger Z pour optimiser leurs chances face à l'Ange, mais en ce cas il faudrait qu'il évite d'en dire trop. Il n'était pas sconvaincu que révéler tous les secrets de la machine à quelqu'un qui travaillait pour la NERV était une bonne idée.

Il arriva enfin à son poste, et prit l'appel.

Et d'un seul coup, il oublia complètement que le sort de l'humanité était sur le point de se jouer.

Il s'attendait à tout, sauf à voir brutalement apparaître sur son moniteur le visage de la plus belle femme qu'il avait jamais vu depuis que son épouse avait quitté le monde des mortels. Le petit sourire qu'elle affichait n'était que politesse, et pourtant il n'arrivait pas à en décrocher ses yeux.

« - Docteur Yumi ? Dit l'apparition. Heureux de faire votre connaissance.
- Kldhbhqsgf, dit le scientifique. »

Sur le moniteur, Ritsuko parut surprise.

« - Pardon ?
- Gkafhtujfdjn, enchaîna le docteur Yumi.
- On dirait que votre communicateur a des problèmes, est-ce que vous me recevez bien ? »

Le docteur Yumi secoua la tête, comme pour se remettre les idées en place. Pour quelle raison il avait à ce point perdu le contrôle de sa diction, il ne pouvait l'imaginer. Ou ne voulait.

« - Oui, oui, tout va bien... Qu'est-ce qui me vaut votre appel, professeur ?
- Nous venons de recevoir un appel d'une colonne de transport ; l'Ange a complètement détruit la route qu'ils devaient emprunter, et ils se retrouvent bloqués.
- Des blessés ? » La nouvelle avait complètement ravivé les facultés d'analyse du docteur Yumi.
« - Quelques légers, mais aucun de grave. Cependant, ils transportaient du matériel de première urgence pour les populations civiles et pour les armées de la JSSDF. Et il faut absolument que ce matériel soit délivré.
- Vous êtes en mesure d'assurer leur sauvetage ?
- Non, c'est pour cela que nous vous avons contacté. Toutes nos ressources sont actuellement mobilisées dans le soutien de l'Eva-01 et de votre machine, et il nous est impossible de nous occuper d'eux, surtout avec l'Ange qui se rapproche de la ville. Etant donné que nous sommes sensés collaborer, est-ce que vous disposez de ressources disponibles pour pouvoir les aider.
- Laissez moi réfléchir...
- Je peux le faire. »

Surpris, le docteur Yumi se retourna. Sayaka se tenait face à lui, les poings sur les hanches et un air déterminé affiché sur son visage. Mais ce qui le choqua surtout était qu'elle portait l'uniforme qui lui avait été donné lors des tests de pilotage qu'elle avait accompli.

« - Sayaka ? Qu'est-ce que...
- Nous avons encore Aphrodite A, papa, le coupa Sayaka. Je n'ai qu'à aller là-bas et à les transporter vers une route praticable.
- Docteur Yumi, de quoi parle-t-elle ? »

Le scientifique reporta son attention vers son communicateur. Le visage de Ritsuko qui s'y affichait le fascina encore un instant, avant que son esprit rationnel ne reprit le commandement.

« - Mazinger Z n'est pas la seule machine à notre disposition. Nous avions auparavant fabriqué l'unité Aphrodite A afin de tester le système de pilotage qui équipe maintenant Mazinger. Et ma fille l'a piloté lors de ces phases de tests, et est la seule à pouvoir d'ailleurs le piloter. » Il se retourna à nouveau vers sa fille, mêlant ses explications à une réponse à la requête de la jeune fille. « Mais Aphrodite A n'a pas été construit dans un but guerrier, et il est hors de question que j'envoie ma fille sur un champ de bataille !
- Pour le moment, il n'est pas question de se battre, n'est-ce pas ? Dit Sayaka sur un air de défi. Je vais là-bas, je me sers d'Aphrodite A pour aider les militaires, et après je rentre à la base !
- Et moi, je te dis que tu vas rester ici à l'abri ! »

Cette fois-ci, Sayaka se rapprocha de son père et lui cria pratiquement au visage, la colère se rajoutant à son impatience. Le docteur Yumi devait bien admettre qu'il ne l'avait que très rarement vue dans un tel état, et à chaque fois cela le secouait plus qu'il ne voulait l'admettre.

« J'en ais assez, papa ! Nous sommes en guerre ! Et dans ces conditions, toutes les ressources doivent être mobilisées ! Bon sang, je suis obligé de rester ici à l'arrière alors que je suis en mesure de contribuer à la protection d'innocents ! Est-ce que tu as la moindre idée d'à quel point cela me tue de devoir rester ici quand je pourrais aider ceux qui en ont besoin ?! »

Pendant un instant, la soudaine explosion de colère de Sayaka impressionna son père, mais il en fallait tout de même plus pour qu'il renonce aussi facilement. Après tout, il était tout de même question du bien-être de sa fille, et sur un tel sujet, il était du genre à se montrer intraitable.

« - Et en quoi cela aidera l'humanité que tu te mettes en danger ? Il faut que...
- Il est juste question de sortir ces types de là ! J'y vais, je ne me bats pas contre l'Ange, et je rentre ! En quoi serais-ce si dangereux ?
- A vrai dire, ses arguments se tiennent, dit Ritsuko. A partir du moment où elle évite de croiser l'Ange, elle ne sera pas en danger. Et en même temps, il faut absolument que ces soldats reçoivent de l'aide... »

Bizarrement, l'intervention de Ritsuko perturba le docteur Yumi plus que l'insistance de sa propre fille. Que celle-ci se rebelle, soit, c'était compréhensible vu qu'elle était à un âge où l'envie de s'affirmer supplante souvent la prudence. Mais qu'une des plus grandes scientifiques de ce monde n'en vienne à approuver une telle décision ? Voilà qui était imprévu.

Et malgré tout, le docteur Yumi voyait tout de même la logique à l'oeuvre, et le peu d'arguments qu'il pouvait réellement y opposer. Il se trouvait que ces personnes avaient besoin de l'aide d'Aphrodite A, que seule Sayaka était capable de piloter la machine, et que cela ne la plaçait pas en première ligne.

Il soupira, et Sayaka sourit immédiatement puisque cela ne pouvait signifier qu'une seule chose.

« Bon... Très bien... Muneshira ? »

L'assistant du docteur Yumi surgit aussitôt dans son dos. Le scientifique dut se retenir de sursauter.

« - Oui, docteur ?
- Nous allons déployer Aphrodite A. Prenez toutes les mesures nécessaires.
- Bien, docteur. »

Alors que l'assistant commençait à transmettre les ordres de son supérieur, Sayaka était déjà en train de courir pour sortir de la salle. Elle prit quand même le temps, alors que les portes automatiques se refermaient derrière elle, de faire de grands gestes à son père, un sourire craquant aux lèvres.

« Merci, papa ! Je serais prudente, promis ! »

Le docteur Yumi se frotta les yeux ; il se fustigea d'ailleurs pour cela : vu le combat qui allait se produire, il ne pouvait se permettre d'éprouver de la lassitude. Les deux... Non, trois pilotes auront sans doute besoin qu'il garde toutes ses facultés.

« Une jeune fille très vivante, apparemment... »

… Facultés qui semblèrent diminuer lorsqu'il entendit à nouveau la voix de Ritsuko.

« - Elle tient ça de sa mère... Elle était parfois aussi difficile à vivre que Sayaka, mais à chaque fois c'était impossible de ne pas lui pardonner.
- Et elle reste digne de confiance ?
- Oh que oui. Sayaka est un peu tête de mule par moment, mais elle connaît ses priorités. Vous pouvez considérer que ces soldats sont déjà sortis d'affaire.
- Parfait. Je vais devoir vous laisser, mes devoirs m'appellent auprès de la NERV...
- Je comprends. N'hésitez pas à me rappeler si vous avez besoin d'aide. »

Pendant un court instant, Ritsuko fronça les sourcils. Elle avait eu le sentiment que cette dernière phrase du docteur Yumi cachait plus de choses qu'elle ne pouvait le voir à première vue (et le scientifique non plus), mais elle ne sembla pas lui en tenir rigueur.

« - Je n'y manquerais pas. Le contact entre nos deux sociétés restera maintenu tout le long du combat, de toute façon. A plus tard, docteur.
- Au plaisir, professeur Akagi. »

Le visage de la jeune femme disparut de l'écran du communicateur, mais pas avant qu'elle n'ait eu le temps de sourire furtivement une dernière fois.

Le docteur Yumi, pour sa part, continuait à fixer l'écran. Quelques uns de ses collaborateurs remarquèrent son immobilité, mais ils prirent cela pour de la concentration et de la préparation mentale. Aucun d'eux ne pouvait savoir qu'en réalité son esprit était resté bloqué sur la dernière image qu'il avait vu de Ritsuko avant la rupture de la communication : ce fin visage qui lui semblait parfait, encadré de cheveux blonds comme les blés... Un petit sourire sur les lèvres...

Il ne revint sur Terre que lorsqu'un cri retentit dans la salle de contrôle :

« KYOURETSU BEAM !!! »


Les deux faisceaux lasers avaient frappés un pan de la forêt , réduisant immédiatement en cendres les immenses arbres qui se trouvaient hélas sur leur trajectoire. Au vacarme engendré par l'explosion causée par l'arme de Mazinger Z, se greffa un cri perçant, inhumain, mélange de douleur et de rage.

Pour sa part, Kouji jubila. Son communicateur s'enclencha aussitôt, révélant le visage paniqué de Shinji.

« - Qu'est-ce qui se passe ?! Il est là ?
- Je crois bien ! Dit Kouji. J'ai vu des arbres s'affaisser et quelque chose s'agiter dans la forêt, et après ce qu'on vient d'entendre, je l'ai sans doute eu !
- Impact confirmé, Kabuto, dit Misato dont la voix résonnait dans les communicateurs des deux pilotes. Mais les dégâts causés ne sont que superficiels, et apparemment il commence déjà à se régénérer.
- Ah, parce qu'en plus ils peuvent se régénérer ? Dit Kouji. Tu parles d'un combat à la loyale !
- Ce n'est pas le moment de se plaindre, Kouji ! Répliqua le docteur Yumi. Contente toi de suivre les instructions du capitaine Katsuragi et de continuer à bombarder cette chose avant qu'elle ne soit sur toi !
- Très bien ! Hé, Shinji !
- Quoi ? Répliqua le jeune garçon.
- T'as intérêt à te mettre en route si tu vas pas que je récolte tous les applaudissements ! »

Kouji aurait sans doute ri en voyant l'expression confuse de son collègue en d'autres circonstances ; mais à cet instant, gagné par la fièvre du combat, il avait déjà reporté toute son attention sur son adversaire. La masse de l'Ange était maintenant parfaitement visible, et elle continuait à se rapprocher de plus en plus. Le sang de Kouji était en ébullition ; il hurla littéralement le nom de sa prochaine attaque, une expression de rage au visage.

« KYOURETSU BEAM !!! »

A nouveau, les yeux de Mazinger Z s'illuminèrent alors que deux faisceaux lasers s'en échappaient. Shamshel semblait avoir senti venir l'attaque, et tenta de se déporter légèrement pour y échapper, mais lorsque Kouji vit son tir rater sa cible, il fit immédiatement tourner la tête de son robot de manière à corriger la trajectoire des lasers. Ceux-ci ne purent toucher l'Ange que durant une fraction de seconde et firent plus de dégâts à la végétation qu'autre chose, mais la créature reçut tout de même de nouvelles blessures, ce qui ne pouvait que renforcer leurs chances de réussite.

Shinji avait déjà commencé sa manoeuvre de contournement. Même si il était impossible à la vue de la masse impressionnante de l'Eva qui se déplaçait avec assurance de le savoir, son pilote était en réalité terrifié... Mais il savait qu'il fallait qu'il tienne, pour lui, pour Kouji, et pour tous les autres.

Je ne dois pas m'enfuir... Je ne dois pas m'enfuir...

Chapitre 5 (6ème partie)

Il avait finalement fallu peu de temps aux militaires pour se réorganiser après l'incident, et la confusion initiale avait fini par être remplacée par la rigueur et l'ordre qui sied à toute opération militaire. Cependant, cela ne changeait pas grand chose à leur situation actuelle : ne disposant pas de matériel adéquat, ils restaient coincés sur leur coin de route, éventré par le passage de Shamshel. Ils auraient pu tenter de faire demi-tour et de rejoindre une autre route, mais cela impliquait un voyage de plusieurs heures, pendant lesquels les civils qui étaient toujours dans Tokyo 3 seraient livrés à eux-même.

Même si les soldats restaient ordonnés, la frustration les gagnaient de plus en plus.

« - Hé, Benkei ! Cria un soldat à l'allure élancée à un de ses congénères, plutôt enveloppé comparé à ses collègues. Combien de temps tu crois qu'on va rester comme ça ?
- J'en sais rien, Hayato, répliqua le soldat Benkei. J'ai entendu le capitaine dire au sergent que l'Institut de Recherche Photonique allait nous envoyer de l'aide, mais on ne voit toujours rien venir.
- Hé, moins fort, vous deux ! Dit un troisième soldat, particulièrement athlétique. C'est pas en vous plaignant que ça changera quelque chose !
- Qu'est-ce qui te prends de dire ça, Ryoma ! Répliqua le soldat Hayato. Tu vas pas me faire croire que ça te fait pas enrager de rester coincé ici !
- Bien sûr que si, et c'est pour ça que j'aimerais que vous la fermiez, ça m'aide pas à me calmer que vous continuiez à déblatérer comme ça !
- Dommage que vous le preniez de cette façon, vous deux, répondit Benkei. C'est rageant, je sais, mais là, vous vous fatiguez pour rien. Mieux vaut garder notre énergie pour quand nous serons vraiment à pied d'oeuvre.
- Ah oui ? Dit Hayato. Et quand tu crois que... »

Un bruit d'arbre en train de se briser le stoppa net dans sa tirade. Ryoma, Hayato et Benkei n'étaient pas les seuls à s'être raidis en entendant ce bruit, et vu l'expérience qu'ils avaient traversés, cela était relativement compréhensible.

Et malgré leur entraînement militaire, aucun des soldats ne put masquer sa surprise lorsque ce qui avait causé ce vacarme surgit devant eux.

Emergeant du contour d'une colline, une gigantesque machine humanoïde se dirigeait vers eux. Haute de quelques dizaines de mètres, elle avait la forme d'une jeune femme, son armure recouvert d'une peinture jaune et rouge qui la faisait violemment ressortir de la végétation. Sa tête était dépourvue de bouche, mais elle possédait tout de même des yeux complètement bleus, dépourvus d'iris ou de pupille. Une espèce de collerette cerclait le cockpit, placé sur le front de la machine., mais pour le moment personne n'arrivait à distinguer le ou la pilote.

La question du sexe du pilote du robot fut d'ailleurs résolue lorsque la voix d'une jeune fille surgit des hauts parleurs d'Aphrodite A et retentit dans la vallée.

« Il paraît que vous avez besoin d'aide pour traverser ? » Dit Sayaka.

Au départ un peu décontenancé, les gradés se reprirent vite et se dirigèrent vers la machine, ceci afin de discuter avec la jeune pilote des modalités de transport. Au bout de quelques minutes, les trois soldats virent Aphrodite A prendre délicatement dans sa main l'un des camions, avant de le déposer au-delà du fossé creusé par le passage de Shamshel. Sayaka entreprit ensuite de recommencer avec un autre véhicule, puis encore un autre.

Pour la plupart des militaires présents, c'était la première fois qu'ils voyaient une telle machine. Ryoma, Hayato et Benkei étaient parmi ceux qui étaient en admiration devant elle.

« - Vous savez quoi, les gars ? Dit Ryoma.
- Quoi ? Dit Hayato, fixant toujours Aphrodite A.
- Un de ces jours, il faudra qu'on pilote une de ces machines.
- Tous les trois en même temps, j'espère ? Dit Benkei.
- Bien sûr, lui répondit Ryoma. Tu vois une autre façon ? »


Les trois motos s'arrêtèrent sur le bord de la route, à un endroit où les arbres étaient suffisamment clairsemés pour leur permettre d'avoir une vue imprenable sur Mazinger Z qui se tenait toujours au beau milieu de la clairière. Boss, Toji, Kensuke, Mucha et Nuke ne pouvait voir ce qu'il visait exactement, mais ils arrivaient tout de même à entendre la voix de Kouji qui tonnait par les hauts parleurs du robot.

Pour le moment, le combat ne les motivait pas beaucoup.

« - Et c'est pour ça qu'ils devraient se la ramener ? Dit Boss. Il se contente de tirer des lasers avec ses yeux !
- Quand même, s'hasarda Mucha, ça a de la gueule... »

Un simple regard de son chef suffit pour qu'il se recroqueville.

« - Et où se trouve Ikari ? Dit Toji, cherchant celui qui exacerbait sa colère.
- Là-bas, on dirait, dit Nuke en désignant un point sur sa droite. Je crois que j'ai vu passer l'Eva entre les arbres.
- Il court au contact ? Dit Kensuke.
- 'Peux pas dire, je vois pas où est... »

De longs filaments énergétiques, semblables à des tentacules, fouettèrent tout à coup l'air, plusieurs dizaines de mètres en face d'eux. Mazinger Z réussit à les esquiver, mais au pris d'une tentative de roulade sur le côté qui ne se déroula pas tout à fait comme son pilote le souhaitait. Au lieu de se rétablir prestement, le robot s'étala sur le flanc de la colline, faisant trembler le sol sous sa masse. Cette maladresse sembla cependant le sauver, car aussitôt d'autres tentacules frappèrent le sol à l'emplacement qu'il aurait occupé si il ne s'était pas allongé.

« ROCKET PUNCH !!! »

Malgré sa position allongée, Kouji avait tout de même réussi à pouvoir dégager l'un des bras de Mazinger Z et à viser son adversaire. Le petit groupe purent voir le poing se détacher du reste du bras et s'envoler vers ce qu'ils pensaient être l'Ange dans un fracas plus assourdissant qu'une batterie de missiles à l'allumage. Si l'attaque avait porté, les jeunes gens ne pouvaient en juger ; tout ce qu'ils virent, ce furent des fragments d'arbre brutalement s'envoler et passer bien au-dessus de la cime de la forêt, avant de voir réémerger le poing de Mazinger Z.

Et alors que le robot essayait de se redresser, surgissant des frondaisons, leur apparut enfin Shamshel.

Et même Toji comprit qu'ils avaient commis une énorme erreur.


Il en fallait plus pour paralyser Kouji de terreur, mais même lui ne put s'empêcher de frissonner lorsque l'Ange se redressa de toute sa masse, dépassant Mazinger Z de quelques coudées. Son corps cylindrique, malgré son aspect lisse, semblait extrêmement musculeux, rappelant un étrange mélange de serpent et d'anguille ; quand à sa tête en forme de cône, elle était tournée dans sa direction, des yeux ronds et inexpressifs au sommet fixant sa proie d'une manière qui fit couler une sueur glacée sur la colonne vertébrale du jeune homme. Il n'y avait aucune expression de discernable dans ce « visage » inhumain, il était même impossible de trouver la moindre trace d'une âme en l'examinant. Cette chose n'avait rien d'humain, mais dans le même temps était tout aussi éloignée de l'ordre animal ; c'était une aberration qui n'avait pour unique but la destruction de l'humanité.

Sous sa tête, plusieurs tentacules luisaient d'une énergie inconnue, prêt à s'allonger pour frapper leur victime. Lorsque Shamshel avait porté ses premières attaques, le professeur Akagi avait immédiatement déduit que l'Ange se servait de son AT-Field non seulement pour supporter sa masse mais également pour accroître le potentiel destructeur de ses tentacules.

Ce qu'était un AT-Field, Kouji n'en avait absolument aucune idée, puisqu'il n'avait pas prêté attention aux explications à ce sujet, mais il avait tout de même retenu que cela était très mauvais signe.

Alors que la bête se préparait à attaquer, l'Eva-01 bondit soudainement dans son dos, la lame du Prog-Knife levée. Le contournement s'était déroulé avec succès, Shamshel ayant reporté toute son attention sur Kouji, mais l'Ange semblait avoir des réflexes beaucoup plus développés que ce que les deux pilotes avaient estimés en premier lieu. La bête réussit d'une contorsion à esquiver le coup que Shinji avait essayé de lui porter, et profita du court moment de confusion qui s'ensuivit pour le fouetter avec ses tentacules. Le manque de préparation empêcha Shamshel de frapper avec toute sa force, mais le choc fut tout de même particulièrement violent pour l'Eva et pour Shinji qui furent repoussés de plusieurs mètres, tout en lâchant le Prog-Knife sous l'effet du choc. Le blindage pectoral de l'Eva était désormais parcouru de plusieurs marques à l'endroit où les tentacules de l'Ange l'avaient frappé.

« SHINJI ! » Cria une Misato paniquée.

Heureusement, l'Ange ne put profiter plus de son avantage : Kouji, voyant son collègue en difficulté, avait immédiatement fait se redresser Mazinger Z et l'avait lancé à l'assaut de Shamshel. Un coup d'épaule du robot lancé en pleine course fut suffisant pour déstabiliser temporairement la créature. L'un des tentacules de la bête siffla dans l'air, dans la direction générale de la machine, mais Kouji réussit à ordonner à sa machine de se baisser. L'attaque de l'Ange rata alors la tête de Mazinger Z de peu.

Shamshel tenta de lancer une nouvelle attaque... Et à ce moment, l'Eva lui planta le Prog-Knife dans le flanc. La créature poussa un hurlement de souffrance qui résonna à plusieurs kilomètres à la ronde, un cri si puissant que les oreilles de Shinji se mirent à siffler. Cela ne l'empêcha pas de tourner la lame de manière à provoquer encore plus de dégâts. A nouveau, l'Ange hurla, mais il se mit également à se débattre violemment. Shinji ne put maintenir l'Ange en place qui finit par lui échapper. La bête lui asséna un violent coup de tête qui le fit s'écrouler à nouveau.

« KYOURETSU BEAM !!! »

L'Ange aurait dû se prendre l'attaque de plein fouet... Mais à l'instant où celle-ci entendit le cri de Kouji, elle détourna une partie de son AT-Field pour créer un champ de force qui stoppa net les deux faisceaux énergétiques. Caché partiellement par la fumée engendrée par l'explosion, Shamshel se jeta sur Mazinger Z qui eut la plus grande peine du monde à se rétablir.

De son côté, Shinji forçait déjà l'Eva à se relever, conscient des risques qu'il encourait à rester dans cette position... Mais il s'arrêta.

Son regard s'était porté sur une portion de route qui se tenait non loin du champ de bataille... Et il lui semblait voir quelque chose sur le bord de celle-ci, quelque chose qui se déplaçait. Dans le feu du combat, il aurait pu croire qu'il ne s'agissait que d'éboulis, mais poussé par un pressentiment, il zooma sur la zone où se trouvaient ces objets...

Et il manqua de s'étrangler.

Il y avait des gens sur cette route, et ils étaient en première ligne pour devenir des dommages collatéraux.

« - Shinji, qu'est-ce qui t'arrive ? Dit Misato. Reprends-toi !
- Ouais, je sais pas si t'as remarqué, lança un Kouji enragé, mais là, j'aurais besoin d'un coup de main !
- Il y a quelqu'un sur la route ! » Cria Shinji.

Aux centres de contrôles de la NERV et de l'Institut, l'information que venait de lancer Shinji avait causé un certain vent de panique. Alors que certains des personnels en charge de surveiller l'évolution du combat se mettait à essayer de confirmer la présence de civils, Misato et le docteur Yumi, eux, commençaient à perdre contrôle de leurs nerfs.

« - Quoi ?! Hurla Misato. Shinji, est-ce que ce sont des civils ou des militaires ?
- Je vais essayer de... »

Un zoom plus poussé renseigna Shinji. Et tout à coup sa panique augmenta.

« - Oh non... Kouji !
- Quoi ? Répondit le jeune homme, alors qu'il essayait de maintenir Shamshel au sol.
- C'est Toji, Kensuke et trois autres types que j'ai croisé à l'école ! Ils vont se faire tuer si ils restent ici !
- Et nous aussi, je te sign... »

Un cri de l'Ange coupa la conversation ; ce ne fut que par un miracle que Kouji évita de se faire couper en deux par les tentacules de la créature. Lorsqu'elle comprit que son attaque avait échoué, Shamshel employa une tactique alternative : la bête planta ses tentacules dans le sol et tira de toutes ses forces. Un large morceau de roche et de terre céda sous l'impensable traction exercée par la créature, et lorsque celle-ci commença à tourner sur elle-même en faisant tournoyer avec elle l'épais morceau de roche, Kouji comprit enfin ce qu'elle s'apprêtait à faire. Appuyant de toutes ses forces sur le commande, il obligea Mazinger Z à se jeter au sol... Juste à l'instant où Shamshel relâcha son projectile improvisé. Un bloc de plusieurs tonnes vola juste au-dessus du crâne du robot, manquant de peu de le décapiter. Kouji était heureux d'avoir échappé à la mort, mais toute son attention se portait déjà sur sa contre-attaque.

Mais Shinji, lui, se mit à paniquer. Parce que si le bloc de pierre avait raté Mazinger Z, il était bien parti pour s'écraser sur la route où se tenaient le petit groupe de lycéens...

Chapitre 5 (7ème partie)

Toji remarqua que le combat commençait à prendre une tournure quelque peu inquiétante, de par la résistance de l'Ange qui surpassait ce à quoi il s'attendait au départ.

Mais lorsqu'il vit l'énorme rocher s'envoler, et qu'il calcula très vite où il allait retomber...

« ET MER... »

Il eut le temps d'agripper Kensuke par le col et de le traîner aussi loin que possible. Quand à Boss, Mucha et Nuke, eux aussi avaient compris ce qui allait se passer, et leurs motos vrombirent aussitôt.

Lorsque le bloc de pierre frappa de plein fouet l'endroit où ils se tenaient à peine quelques secondes plus tôt, le bitume vola en éclat et fut éventré sans que quoi que ce soit ne puisse parvenir à empêcher le désastre. Malgré leurs réflexes, les jeunes gens subirent tout de même les effets de l'onde de choc et ne purent éviter l'ensemble des débris qui s'étaient mis à voler en tous sens. Toji et Kensuke furent projetés au sol, presque assommés par le fracas et les volées de pierre et de bitume qui volaient dans tous les sens, déchirant au passage leurs vêtements en de nombreux points. Boss, Mucha et Nuke, furent désarçonnés et chutèrent de leur monture, en glissant avant d'être stoppés par le flanc de la colline (pour Mucha et Nuke) ou par un tronc d'arbre (pour Boss). Si l'impact fut douloureux, ils s'en tirèrent cependant mieux que leurs motos dont les moteurs, les guidons et les fourches ne résistèrent pas aux chocs.

Douloureusement, les trois motard et les deux autres jeunes hommes se remirent sur leurs pieds. Cependant, il leur était impossible de pouvoir se rassembler : le bloc de pierre se tenait désormais au beau milieu de la route, séparant les jeunes hommes en deux petits groupes, Toji et Kensuke d'un côté, Boss, Mucha et Nuke de l'autre... Et si cela ne suffisait pas, le choc avait fait s'effondrer une bonne partie de la colline, bloquant toute fuite aux deux petits groupes. Les jeunes garçons étaient bloqués, et ils ne pouvaient espérer s'en sortir.


Shinji obligea l'Eva à se relever et le fit courir vers le lieu du désastre. Il n'avait que peu de temps devant lui, il le savait : jusque là, Kouji avait fait du bon travail en harassant constamment l'Ange, mais il ne pourrait tenir seul très longtemps. Il fallait qu'il résolve la situation au plus vite.

Et il ne voyait qu'une échappatoire...

Toji et Kensuke virent l'Eva se plaquer contre le sommet de la colline juste en face d'eux, le haut de son dos émergeant légèrement de ce qui constituait autrefois le bord de la route. L'énorme câble d'alimentation de l'Eva sembla gémir lorsque la machine l'empoigna et l'écarta afin d'éviter qu'il ne la gêne. Et, dans un sifflement terrible, quelque mécanisme se déclenchait sur le dos de la machine.

« - Shinji ? Demanda Misato. Qu'est-ce que tu...
- Je sais ce que je fais. Faites moi confiance. »

L'Entry Plug émergea de l'ouverture spéciale et se stoppa net aux deux tiers de sa longueur, faisant penser à une barre à mines qui aurait été planté dans le dos de l'Eva. Son écoutille s'ouvrit toute grande face aux deux rescapés ; et, dans l'ouverture qui s'était formée, Toji et Kensuke purent voir Shinji qui leur faisait de grands signes.

« Allez, vite ! Montez ! »

Les deux garçons restèrent un instant interdits, hésitant sur la conduite à tenir. Les choses prenaient une tournure de plus en plus inattendue, et surtout incroyablement plus dangereuse. Mais leur instinct de survie finit par prendre le relais. Le choix était simple : ou bien ils restaient à découverts, à la merci de la moindre attaque, et leurs chances de survie étaient à peu près aussi élevée que celles d'un hérisson qui tenterait de traverser une autoroute ; ou bien ils montaient à bord d'une machine blindée jursqu'à la gueule et à la puissance phénoménale, plus à même de les protéger.

Si tous les deux étaient arrivés à la même conclusion, ce fut malgré tout Kensuke qui se jeta en premier dans l'ouverture de l'Entry Plug.

Shinji dut se ramasser sur lui-même pour laisser un peu de place à ses deux camarades, et même cela ne les empêchait pas de se sentir quelque peu à l'étroit dans l'habitacle, qui n'avait pas été conçu pour accueillir trois personnes. Un chuintement métallique suivi d'une sensation de mouvement informa Toji et Kensuke que l'Entry Plug rentrait à nouveau à l'intérieur de l'Eva. Lorsque le LCL commença à emplir l'habitacle, les deux jeunes hommes commencèrent à paniquer... Mais il suffit que Shinji leur signale qu'ils arriveraient à respirer sans problèmes et qu'il avait passé des heures dans le liquide sans effets secondaires pour qu'ils cessent de s'agiter. Ils eurent tout de même quelques difficultés à laisser le liquide pénétrer dans leurs poumons, ce qui après tout allait à l'encontre de leur instinct de survie le plus élémentaire...

« - Shinji, nom de Dieu, qu'est-ce que tu fous ?! Cria Kouji depuis le communicateur. Je vais pas pouvoir le retenir plus longtemps !
- Tiens bon encore un peu, Kouji ! Il faut que j'aille chercher les trois autres !
- N'y pense même pas, Shinji ! Cria Misato. Où voudrais-tu les mettre ? Vous êtes serrés comme des sardines là-dedans, et il faut que tu poursuives l'opération !
- Quoi ?! S'insurgea Kensuke. Mais on ne peut quand même pas les laisser là ! Ils vont se faire massacrer !
- Je ne sais pas comment, s'hasarda Shinji, mais je...
- ATTENTION !!! »

Le cri de Kouji manqua de transpercer les tympans de Shinji, mais il comprit très vite de quoi il en retournait lorsque les écrans de l'Entry Plug se réactivèrent et lui permirent de voir ce qui se passait à l'extérieur. Shamshel avait réussi à jeter Mazinger Z au loin, l'envoyant s'écraser plusieurs dizaines de mètres plus loin... Et maintenant, la bête avait reporté son attention sur lui.

Shinji poussa l'Eva à se jeter au sol, improvisant une roulade désespérée. Les tentacules de l'Ange firent exploser la roche à l'endroit où le thorax de l'Eva-01 se trouvait à peine un dixième de seconde plus tôt. Il fallait toute la concentration de Shinji pour qu'il réussisse à faire se redresser sa machine... Et tous ses réflexes pour qu'il la fasse sauter vers la droite pour esquiver une autre attaque orientée vers ses pieds.

Toji et Kensuke, n'étant pas calés dans le fauteuil du pilote, se cognaient contre les parois de l'Entry Plug à chaque mouvement brusque de l'Eva. Combiné à leur panique quand à la tournure des évènements, cela ne faisait que renforcer l'aspect apocalyptique que revêtait de leur point de vue le combat.

« - Aïe ! Bon sang, Hikari, fais gaffe ! Cria Toji, sa peur couvrant pour le moment la haine qu'il éprouvait toujours envers le jeune pilote.
- Je fais de mon mieux ! Répliqua Shinji. Mais cette chose ne me...
- AAAAAAAAH !!! »

Le cri perçant de Kensuke ramena l'attention de Shinji à son adversaire, qui avait tenté une fois de plus de le décapiter grâce à ses tentacules. Un simple mouvement de la tête de l'Eva-01 suffit à empêcher la catastrophe.

« - OH MON DIEU ! OH MON DIEU ! OH MON DIEU ! Cria un Kensuke en état de choc.
- Hikari, fais quelque chose ! Hurla Toji. Réplique ! Bats... »

Toji fut interrompu lorsque Shinji ordonna à l'Eva de se précipiter contre l'Ange. Il avait perdu le Prog Knife ; la seule défense qui lui restait était l'impressionnante puissance physique de l'Eva. Et même si il aurait à cet instant préféré être à des milliers de kilomètres, il ne lui restait plus qu'à tout faire pour survivre, et empêcher ses deux camarades de se faire tuer eux aussi ; sans compter qu'il fallait qu'il empêche à tout prix l'Ange de blesser les trois autres garçons, restés coincés dans les décombres sur la route. Et il ne pourrait pas le faire en continuant à esquiver les assauts de Shamshel.

Le poing de l'Eva s'écrasa contre le visage de l'Ange, déstabilisant la créature. Le combat pouvait réellement commencer.


« - Bon sang ! Cria Muneshira pratiquement dans l'oreille de son employeur. Vous avez vu ce que l'Eva vient de mettre à l'Ange ?
- Oui, mais ça ne semble pas devoir stopper cette créature, répliqua le professeur Yumi. Sans compter qu'il reste encore des civils sur les lieux !
- Impossible de faire quoi que ce soit pour eux, j'en ai bien peur... Notre priorité essentielle est la destruction de l'Ange... Et pour le moment... »

Sur l'écran, Shamshel finit par repousser l'Eva avant de l'envoyer s'écraser contre un flanc de la colline qui avait jusque là été épargnée. Mazinger Z apparut brutalement dans son dos et tenta de prendre l'avantage sur la bête, mais l'Ange sembla avoir perçu la présence de la machine, puisque dans un seul moment il se retourna et tenta de le frapper de ses tentacules ; ce qui, grâce aux réflexes de Kouji, ne se traduisit que par une claque contre l'épaule du robot.

« - … On ne peut pas dire que cet objectif semble aboutir...
- Bon sang, on ne peut pas les laisser là ! Ils n'ont aucunes chances de s'en sortir, même en supposant qu'ils puissent se cacher quelque part !
- Alors, j'irais les chercher ! »

La voix qui avait brutalement résonnée dans la pièce de contrôle par l'intermédiaire des hauts-parleurs avait réussi à surprendre tout le monde, en premier lieu le professeur Yumi... Lequel manqua de s'étouffer lorsqu'il reconnut celle qui venait d'hurler.

« - Sayaka ! Je te l'interdis, tu dois déjà t'occuper des troupes de la JSSDF !
- J'ai terminé avec eux, ils ont déjà en route pour Tokyo 3, papa ! Répliqua la jeune fille. Mais plutôt que de retourner à la base, je peux aller chercher les autres ! Comme ça, pendant ce temps, Kouji et Shinji peuvent se concentrer sur l'Ange !
- C'est de la folie, mademoiselle Sayaka ! S'écria Muneshira. Vous allez être trop proche des combats !
- C'est ça ou avoir des morts d'innocents sur la conscience !
- Tu n'es pas équipée pour te retrouver en situation de combat, Sayaka ! Cria le père de la jeune fille. N'y va pas !
- Désolé papa, je te reçois très mal...
- SAYAKA, JE TE PREVIENS, SI TU...
- A tout à l'heure ! »

Un léger crépitement dans les hauts-parleurs indiqua que la pilote d'Aphrodite A venait de couper le communicateur. Bien entendu, cela mena le professeur Yumi à deux doigts d'exploser... Le scientifique lâcha un juron tellement obscène que les oreilles de tous ceux qui avaient été en mesure de l'entendre se mirent à siffler.

Mais pourquoi fallait-il qu'elle tienne à ce point de sa mère ?

« - Hum, professeur ? Commença Muneshira. Que devons nous...
- Appeler la NERV immédiatement, dites leur que notre second pilote va extraire les derniers civils du lieu du combat contre notre gré, et demandez leur si ils sont en mesure de nous fournir un visuel sur elle ! Le coupa le professeur. Et si jamais ils s'avisent de faire une réflexion, répondez leur qu'aussi déplorable que soit l'attitude de ma fille, nous avons des problèmes plus importants à régler ! »

Muneshira n'eut même pas besoin de répéter les ordres du professeur : vu le volume sonore qu'il avait employé pour donner ses ordres, n'importe quelle personne présente dans la salle de contrôles (ou même dans l'Institut en entier) pouvait les avoir entendu.

Par contre, il y avait un détail que le collègue du professeur Yumi n'avait jamais bien compris, c'était que parfois il valait mieux garder pour soi ce que l'on pensait.

« - Si l'on avait installé les améliorations que j'avais évoqué, votre fille aurait été plus en mesure de...
- UN MOT DE PLUS, MUNESHIRA, ET JE VOUS ENVOIE NETTOYER L'HYPERDRIVE DE MAZINGER Z A LA BROSSE A DENTS APRES LE COMBAT !!! »


A cette phase du combat, Boss avait depuis longtemps oublié qu'il était sensé apparaître comme imperturbable et courageux auprès de ses fidèles disciples. Pour l'heure, il était caché derrière un rocher, épiant à travers les gravats l'évolution du combat, à deux doigts de souiller son pantalon, et invoquant mentalement sa génitrice de manière répétée. Mucha et Nuke, pour leur part, avaient encore moins de scrupules et étaient roulés en boule derrière d'autres débris, l'un criant au moindre choc et à la moindre secousse causé par le combat entre les titans, et l'autre pleurant abondamment.

Non, décidément, cette petite virée était une très mauvaise idée.

« JE VEUX PAS MOURIR ! Cria Mucha. JE VEUX PAS MOURIR ! »

Boss risqua un oeil hors de son abri... Et vit Mazinger Z frapper Shamshel un peu en dessous du visage, avant de se faire fouetter en pleine poitrine par les tentacules de l'Ange et être jeté à terre. Il décida que finalement, il préférait ne pas savoir ce qui se passait. Le jeune homme préféra plaquer son dos contre le rocher qui le protégeait de manière très sommaire contre le chaos derrière lui.

C'est du fait de sa position qu'il fut le premier du petit groupe à voir émerger des arbres en face de lui une énorme masse métallique rouge et or. Quand il réalisa qu'elle venait dans sa direction, il se mit à hurler comme un dément. Il ne fallut que quelques secondes pour que Mucha et Nuke se joignent à lui lorsqu'ils virent ce qui avait provoqué cet accès de panique de leur chef. D'ailleurs, il se pressèrent contre lui dans le même mouvement.

Leurs cris attinrent leur paroxysme lorsque la chose se pencha vers eux.

« Boss ? C'est toi ? »

Le jeune homme ne répondit pas ; il était trop occupé à être terrifié pour reconnaître la voix qui avait retentit par les hauts-parleurs d'Aphrodite A. Ses acolytes ne semblaient pas avoir réalisé qu'il n'y avait pas de dangers. En fait, tous les trois continuaient à hurler.

« Boss, du calme ! C'est moi, Sayaka ! »

Ce ne fut qu'à ce moment que le chef de bande commença à comprendre que les choses n'étaient pas aussi graves que ce qu'il craignait ; en fait, le robot s'était à ce moment-là tellement penché en avant que Boss put enfin distinguer le pilote de la machine. Il fallut cependant un peu plus de temps à Mucha et Nuke pour réaliser ce qui se passait.

« - Sayaka ? Tu es venu pour moi ? Dit Boss, à mi-chemin entre le soulagement et la joie.
- Pour toi et tes deux amis, répliqua la jeune fille. Allez, on a pas de temps à perdre ! On doit évacuer la zone et en vitesse ! »

Afin de ponctuer ses paroles, Sayaka fit se redresser Aphrodite A, avant de la faire joindre ses mains en bol, au niveau des trois jeunes hommes. Lesquels, cependant, hésitèrent un peu pendant quelques secondes. Même si l'intervention de Sayaka représentait leur seule chance de s'en sortir, ils n'étaient pas non plus sûr qu'ils réussiraient à grimper dans les mains de la machine sans encombre.

Cette hésitation ne dura que quelques secondes.

Quelques secondes de trop.

Chapitre 5 (8ème partie)

Shamshel réussit à se dégager de la prise que lui faisait Mazinger Z pour le rejeter au loin. L'Ange se mit à chercher du regard son autre adversaire ; il avait réussi à le jeter à terre quelques secondes plus tôt, mais ces êtres s'étaient montrées beaucoup plus combattives que ce à quoi il s'attendait, aussi ne valait-il mieux pas leur laisser le temps de se remettre...

Et ce faisant, il aperçut Aphrodite A.

Kouji, essayant de se remettre debout, vit lui aussi la forme rouge et or du robot féminin. Sur le coup, il n'avait aucune idée de qui pouvait bien piloter l'engin ; par contre, il put voir l'Ange se désintéresser de lui et se jeter contre ce nouveau rival potentiel.

Boss, Mucha et Nuke ayant enfin acceptés de monter dans les mains d'Aphrodite A, Sayaka fit se relever son robot... Ce qui lui valut de voir l'Ange se diriger vers elle à grande vitesse. Pendant les courts instants qui suivirent, malgré sa panique grandissante, elle essaya d'élaborer une échappatoire. Il lui était de se défendre alors qu'elle tenait dans ses mains ses trois amis ; il était impossible qu'ils puissent en réchapper. Fuir ? Le temps qu'elle se retourne, la bête serait sur elle... L'esquiver ? Entre la colline sur sa gauche et la forêt à sa droite, aucune solution ne lui permettrait de réussir sans heurter ses passagers.

Elle n'avait aucune marge de manoeuvre, et dans une deux secondes, Shamshel serait sur elle.

Elle allait se mettre à crier ; Boss, Mucha et Nuke, eux, le faisaient déjà depuis longtemps...

Quand tout à coup, l'Eva-01 tenta de plaquer l'Ange par le côté.

Au lieu de s'écraser contre Aphrodite A, Shamshel fut aplati contre le sol, non sans emporter son attaquant dans sa chute. Les deux combattants roulèrent sur le sol sur plusieurs dizaines de mètres, luttant férocement pour se libérer de l'étreinte de leur adversaire tout en essayant de lui porter un coup fatal. Toujours sous le choc, Sayaka pouvait voir l'Eva rouer de coup l'Ange alors que celui-ci faisait fouetter ses tentacules de manière désordonnée, ce qui réussissait à gifler la machine géante.

Malgré le tumulte, la voix de Shinji retentit par les hauts parleurs, assez fort pour que la pilote d'Aphrodite A puisse l'entendre.

« FUIS !!! »

Reprenant enfin ses esprits, et sachant pertinemment qu'elle ne pouvait rien faire pour aider son sauveur, Sayaka s'enfuit en emportant avec elle Boss, Mucha et Nuke, qui étaient toujours en train de hurler de peur.

Dans le cockpit de l'Eva, Shinji luttait comme un forcené pour essayer de se sortir du pétrin dans lequel il s'était mis, réalisant qu'un corps à corps ne pouvait pas se finir bien. Mais cela se révéla plus difficile que prévu ; non seulement Shamshel luttait avec une rage indescriptible, mais en plus, le jeune garçon n'arrivait pas à focaliser son esprit sur sa tâche, à cause de la douleur que lui infligeait les attaques de l'Ange.

Et à cela, s'ajoutait la panique qui gagnait Toji et Kensuke, qui commençaient à régresser à l'état de bêtes apeurées dans son dos.

« - Shinji, désengage toi tout de suite ! Hurla Misato dans le communicateur. Eloigne toi de cette chose !
- J'essaie... Répliqua Shinji, entre deux spasmes de souffrance. J'essaie, mais... »

Un instant, sa peur revint à la charge, menaçant de le submerger et de lui faire perdre le contrôle de l'Eva. Il pouvait sentir la machine, ou la créature, ou quoi qu'était la chose qu'il pilotait s'insurger de se faire ainsi battre par l'Ange sans que la frêle chose qui la bridait ne la laisse se défendre efficacement.

Dans son dos, Kensuke se mit à hurler, tandis que Toji s'agrippa à son épaule.

Cela raviva une parcelle de sa force. Si il échouait... Il ne serait pas le seul à mourir. C'était lui qui avait insisté pour qu'ils entrent dans l'Entry Plug, il avait mis leurs vies en danger de ce fait... Et cela ne ferait que rendre sa défaite cent fois moins acceptable.

Le poing de l'Eva-01 s'abattit sur ce qui servait de visage à Shamshel avec une violence imprévisible vu leur position. Profitant de la confusion de son adversaire, Shinji réussit à ramener une des jambes de l'Eva et, d'un geste brusque, réussit à repousser la masse imposante de l'Ange. Il en profita immédiatement pour se redresser.

Pendant un instant, Shinji jubila.

« J'ai réussi ! J'ai... »

Un des tentacules de Shamshel fouetta l'air et, dans un seul geste, trancha le cordon d'alimentation de l'Eva... Ainsi que son bras gauche.

La souffrance qui parcourut tout le corps de l'Eva se transmit à son pilote instantanément. Et le cri de douleur que poussa Shinji fut couvert par le propre cri terrifiant que la machine poussa avant de tomber à genoux.

Un vent de panique s'empara du centre de commandes de la NERV et de l'Institut. Chacun connaissait les risques que couraient les pilotes en engageant le combat avec cette créature, mais parfois, la connaissance ne suffit pas pour diminuer le choc lorsque l'inévitable finit par se produire.

« - Oh mon dieu, non ! Cria Misato.
- Synchronisation en chute libre ! Hurla l'un des scientifiques de la NERV. Perte de signal avec l'Entry Plug.
- Il faut qu'il sorte de là, répliqua Ritsuko. Il ne dispose plus que de quelques dizaines de secondes d'autonomie, et il ne peut pas se défendre !
- Shinji ! Cria une Misato au bord de la panique. Je t'en prie, Shinji, réponds moi ! Fuis ! Tu dois fuir ! »

Seul Gendo Hikari restait impassible. C'était un événement très regrettable... Avec ce genre de blessures, il allait être obligé de laisser la JSSDF pilloner la créature, le temps que l'on récupère l'Eva et son pilote et que l'on les remette d'aplomb. La possibilité que son propre fils puisse mourir, cependant, ne semblait pas le perturber outre mesure...

La même stupeur avait frappée l'Institut de Recherche Photonique. Voir un allié se faire abattre de manière aussi violente ne pouvait que frapper les esprits, sans compter que cela constituait le premier indice tangible d'à quel point les Anges pouvaient être dangereux même contre des adversaires aussi puissants que les Evangelion de la NERV.

« - L'Eva-01 est hors de combat ! Cria l'un des assistants du docteur Yumi. 90 secondes avant que la machine ne soit à court d'énergie !
- Et le pilote ? Cria le docteur Yumi, aussi inquiet pour Shinji que ne l'était Misato. Est-il toujours vivant ?
- A première vue, oui... Mais... »

Il suffisait de regarder l'écran géant qui retransmettait les images du combat pour comprendre où se situait le « mais » : Shamshel s'était redressé, et se préparait à frapper à nouveau son adversaire qui se retrouvait maintenant à genoux, trop faible pour continuer à hurler, sa main valide empoignant son moignon.

Horrifiée par ce qu'elle voyait, Misato continuait d'ordonner à Shinji de fuir, sans que le garçon ne semble pouvoir lui répondre. Tous les spectateurs de la scène étaient terrifiés, se sentant impuissant à empêcher le massacre qui était sur le point de se produire.

Tout ce monde était si choqué par ce qui était arrivé à l'Eva-01 qu'il en oublia un important détail...

Shinji n'était pas seul.

« ROCKET PUNCH !!! »

Le poing de Mazinger Z frappa Shamshel avec une violence suffisante pour renverser la bête alors même s'était mise en position de défense lorsqu'elle avait entendu le cri de son autre adversaire. Kouji n'attendit même pas que le poing se réattache pour charger l'Ange. Mazinger Z bondit dans les airs et en profita pour délivrer un coup de pied sauté à la bête qui écrasa sa tête contre le sol.

« TU VAS PAYER POUR CE QUE TU LUI AS FAIT, ORDURE !!! » Hurla un Kouji dans un état de rage indescriptible. Jamais le jeune homme n'avait autant souhaité la mort de quelque chose depuis le jour où il avait appris que Shiro s'était fait agressé par des petits caïds...

Mais Shamshel se ressaisit très vite. Le duel entre l'Ange et la Forteresse de Fer débuta.


Toji ne comprenait pas ce qui s'était passé... Même si il avait bien vu que l'Ange avait attaqué une nouvelle fois, il n'avait ressenti aucunes secousses... Et pourtant, Shinji s'était soudainement mis à hurler en empoignant son bras gauche. Le garçon était secoué de spasmes violents et semblait comme possédé, ne cessant de crier à propos de son bras qui semblait pourtant ne rien avoir. Maintenant, Shinji s'était recroquevillé sur lui-même, tremblant, au bord de l'évanouissement.

Kensuke était aussi perdu que son ami. Lui non plus n'arrivait pas à s'expliquer pourquoi Shinji était dans cet état. Pour en rajouter à la confusion, tous deux pouvaient entendre Misato hurler à l'attention de Shinji, lui intimant de s'enfuir et de se mettre à l'abri.

« - Shinji ? Demanda Kensuke. Shinji, ça va ?
- Mal... Bredouilla le jeune garçon, son visage toujours fermé et pratiquement collé contre sa propre poitrine. Tellement... Mal...
- Mais bon sang, qu'est-ce qu'il a ?! Cria Toji. Remue-toi, Shinji ! On va se faire tuer si on reste comme ça ! Qu'est-ce qui te prends ? Bouge toi ! »

A ce moment-là, le Rocket Punch de Mazinger frappa Shamshel. Kensuke soupira de soulagement. Cela leur laissait un peu de répit... Mais ils ne pouvaient espérer que cela dure éternellement. Alors qu'il observait le combat frénétique qui se déroulait sous leurs yeux entre Mazinger Z et Shamshel, Kensuke nota les diverses informations qui clignotaient sur les écrans de l'Eva. Il reconnut un compte à rebours, indiquant vraisemblablement combien d'autonomie qui leur restait (trop peu à son goût), mais également plusieurs messages d'alerte sur l'état de l'Eva, tous plus alarmants les uns que les autres.

« Je ne sais pas ce qui se passe, dit Kensuke. On dirait que... »

Lorsqu'il réalisa soudainement ce qu'il se passait, son cerveau manqua d'imploser du fait de tout ce que cela pouvait signifier. Il ne savait si il devait être fasciné par ce que cela indiquait sur le fonctionnement de l'Evangelion, ou si il devait être horrifié par cette symbiose obscène.

« - C'est impossible...
- Quoi ? Dit Toji, qui reportait son attention sur son ami.
- Il ressent tout...
- De quoi tu parles ?
- Shinji... Il ressent tout ce qui arrive à l'Eva ! Depuis le début du combat, chaque fois que l'Eva est endommagé, c'est comme si c'était lui-même qui était blessé ! »

En d'autres circonstances, Toji aurait rejeté tout ce que son ami venait de dire... Mais il venait de passer plusieurs minutes dans l'Entry Plug au côté de Shinji. Autant qu'il en savait, Shinji pilotait l'Eva pilotait par la pensée... Considérer que la fusion entre les sens du garçon et ceux de la machine puisse aboutir à un tel résultat ne semblait pas si fantasque que cela. D'autant plus que cela pouvait expliquer le comportement que le garçon avait eu tout au long de l'affrontement ; ses cris chaque fois que l'Eva se faisait frapper, son hésitation à certaines occasions à engager le combat... Se battre contre une créature de cette taille à bord d'un robot géant est déjà intimidant, mais quand en plus chaque blessure du robot devient la sienne ? Qui n'aurait pas peur ?

Toji aurait été incapable de mettre les termes corrects, mais il avait également ressenti comme un certain malaise tout au long du combat. La douleur et la terreur de Shinji avait été par moment palpable. Ce que venait de lui révéler Kensuke donnait un autre sens à ce qu'il avait enduré au cours du combat.

Toji agrippa le garçon et le releva, décidé à l'aider à regagner ses esprits. Ce faisant, il vit le visage du jeune garçon... Et si il pouvait encore avoir un soupçon de doute, celui-ci fut anéanti. Comment aurait-il pu nier l'expression de souffrance qui déformait le visage de Shinji ?

La haine qu'il pouvait ressentir pour le jeune garçon s'évanouit sans qu'il ne s'en rende vraiment compte. Lui et Kouji risquaient réellement leurs vies pour les sauver ; mais Shinji, en plus, devait faire face à des séquelles directes. Pour les protéger, il devait souffrir. Comment avait-il pu penser que Shinji pouvait aimer sa condition ? Qu'il pourrait apprécier la gloire venant de son rôle de pilote alors que celui-ci ne lui apportait que de la souffrance ?

« Shinji... Ecoute moi, Shinji, ce n'est pas ton bras qui a été coupé ! Tu dois te ressaisir et nous sortir de là ! Tu ne peux plus rien faire, maintenant ! »

Le garçon ne répondit pas. Il restait prostré, assommé par la douleur.

Les réserves d'énergie de l'Eva continuaient à chuter.

Chapitre 5 (9ème partie)

Mazinger Z se jeta une nouvelle fois sur Shamshel, essayant de trouver son point faible, mais la bête se contentait d'encaisser ses coups sans paraître en souffrir. La résistance de l'Ange, cependant, ne découragea pas Kouji. Plus encore que tout ce que la créature lui avait fait souffrir, Kouji voulait la massacrer afin de venger Shinji... Et, espérait-il, pouvoir se faire pardonner de ne pas avoir réussi à empêcher que son ami ne souffre à ce point.

Le docteur Yumi, lui, restait suffisamment rationnel malgré la situation pour savoir que la technique de Kouji ne pouvait aboutir.

« - Kouji, ne reste pas au corps à corps ! Abandonne le combat !
- Hors de question ! Hurla Kouji. Je vais lui arracher le coeur à mains nues si il le faut, mais moi vivant, cette chose ne partira pas d'ici en un morceau !
- Bon sang, Kouji, Shinji et toi aviez déjà du mal à le contenir à vous deux, et tu penses pouvoir t'en charger seul ?!
- Je dois le faire ! C'est le seul moyen !
- C'est du suicide ! Cria Misato, qui avait gardé ouvert le canal entre la NERV et Mazinger Z. Ecoute moi, Shinji a absolument besoin de soins d'urgence, et il est dans l'incapacité de faire se déplacer l'Eva ! Si vous n'évacuez pas vite tous les deux, vous allez y rester ! »

Kouji hésita. Ils avaient raison ; pendant qu'il se battait contre Shamshel, Shinji risquait d'y rester. Le jeune homme ignorait comment cette fichue connexion entre l'Eva et son pilote fonctionnait exactement, mais d'après les quelques éléments que lui avait fourni Shinji, il devait salement déguster à ce moment. Son regard se détourna un instant de Shamshel pour essayer de voir l'Eva...

Un instant que mit à profit l'Ange.

Un claquement de tentacules frappa Mazinger Z aux jambes. Kouji sentit brutalement tout le poids de son robot s'abattre au sol, le choc lui faisant lâcher ses commandes. Shamshel en profita pour tenter de le maintenir. Si la bête réussissait à le paralyser, alors elle pourrait donner le coup de grâce.

L'Ange poussa un sifflement, trahissant son excitation à l'idée d'achever cet ennuyeux adversaire.


« Reste avec nous ! Shinji, je t'en prie, reste avec nous ! »

Shinji aurait voulu dire à Kensuke qu'il l'entendait parfaitement, mais il souffrait encore trop pour pouvoir prononcer un mot. La douleur commençait à s'évaporer un peu, mais il n'arrivait toujours pas à se mettre à l'esprit que les blessures que recevait l'Eva n'étaient pas les siennes. Sa vision embrumée ne percevait qu'imparfaitement ce qui l'entourait, mais il pouvait tout de même vaguement distinguer les formes de l'Ange et de Mazinger Z qui luttait au loin.

« - On doit se tailler d'ici, et vite ! Cria Toji. Allez, Shinji, remets-toi !
- Shinji, cria Misato, si tu m'entends, quitte les lieux en vitesse ! Il te reste peu de temps ! »

Son cerveau était tellement concentré par la douleur que, bien qu'entendant ce que ses camarades et sa supérieure lui intimait de faire, il avait du mal à réfléchir de manière efficace. Fuir ? Ils lui demandaient de fuir ? Après tout... Pourquoi pas ? Il n'était pas de taille. Il avait été fou de croire qu'il pouvait l'être... Lui, un héros ? Il n'était qu'un gosse de 14 ans, bon sang ! Il avait déjà un mal de chien pour choisir lui-même quels vêtements il pourrait porter selon la météo, et on l'avait mis dans un robot géant avec pour ordre de sauver le monde ! Quelle vaste blague !

Oui. Fuir était plus raisonnable. Il ne pouvait rien faire de bon.

…

N'est-ce pas ?

Oui, bien sûr.

Il n'empêche... Si il n'était pas intervenu, le pilote de la « robote » jaune et rouge aurait sans doute été tué.

Pour ce que ça lui avait apporté... Son Eva avait perdu un bras, son alimentation, et lui s'était retrouvé dans un état quasi-comateux !

Oui... Mais il était toujours vivant. Et l'autre pilote aussi.

Ça ne changeait rien. Même si il n'avait pas été là, Kouji l'aurait sans doute sauvé. Et sans subir les mêmes conséquences.

Sauf que ce n'est pas Kouji qui a sauté sur Shamshel pour sauver le troisième pilote. C'était lui. Alors oui, Kouji se serait peut-être mieux débrouillé... Mais au moins, il avait agi et fait la chose qu'il fallait faire. Il n'était pas resté dans son coin, à se rouler et à pleurnicher. Il n'avait même pas réfléchi avant d'agir ; il n'y avait pas le temps. Il avait vu le pilote en difficulté, et immédiatement il avait agi.

Et alors ?

Alors, il ne voyait qu'une conclusion : il n'a pas besoin d'être le meilleur. Il n'a qu'à agir... Et cela suffit à empêcher des tragédies.

« Shinji, réveille toi ! Cria Kensuke. On doit fuir ! »

Luttant enfin contre la douleur, Shinji se tourna vers son compagnon et le regarda dans les yeux.

« Je ne fuirais jamais. »

L'Eva quitta sa position prostrée et se tint sur ses genoux. Shinji pouvit entendre Misato se réjouir de son retour et tout de même l'intimer de quitter le champ de bataille, mais il n'y prêtait pas attention. Il regardait son frère d'armes tenter de se défendre contre l'Ange...


Mazinger Z tomba de tout son poids contre le sol, face la première. Malgré le choc, Kouji tenta immédiatement de faire se relever son robot.

Shamshel se plaça au-dessus de son adversaire, le plaquant de tout son poids. Mazinger Z tentait encore de se dégager, mais ce faisant, il n'avait plus aucun espace pour pouvoir se défendre.


Shinji regarda les alentours. Sur sa gauche, le bras que l'Eva avait perdu était toujours parcouru de spasmes, un phénomène qui achevait de le convaincre qu'il s'agissait moins d'une machine que d'un être vivant. A sa droite, le Prog-Knife, qu'il avait lâché lors de la bataille, planté dans le sol par la lame. Au loin, Shamshel, dominant de toute sa taille Mazinger Z.

Il devait agir. Jeter le Prog-Knife ne serait pas suffisamment, il n'y aurait pas assez de force. Ce qu'il faudrait...

Une idée se forma dans l'esprit du jeune garçon. Il ne lui restait plus beaucoup de temps avant que l'Eva ne soit complètement désactivée. Il fallait que ces dernières secondes comptent et soient fatales pour l'Ange.

Ignorant les ordres de Misato, Shinji attrapa le bras coupé de l'Eva avec celui qui lui restait et le rapprocha de lui, avant de le reposer et d'attraper le Prog-Knife.

La suite, Kensuke et Toji eurent un peu de mal à la comprendre. Shinji plaça le Prog-Knife dans la paume de la main coupée, la lame passant entre le majeur et l'annulaire, avant de refermer les doigts. Le poing valide de l'Eva pressa ensuite l'ensemble avec une force extraordinaire, à un point tel que le manche de l'arme et les doigts semblèrent pratiquement fusionner. Shinji fit ensuite soulever l'ensemble, et secoua quelque peu le bras coupé ; le Prog-Knife restait en place, refusant de quitter sa position. Quand au bras, il restait quelque peu rigide, le poing restant aligné avec l'avant-bras sans que le poignet ne plie. Le garçon sourit, satisfait de son montage.

Malgré le fait que la majeure partie des observateurs se préoccupaient en priorité du sort de Kouji, quelques uns à la NERV et à l'Institut de Recherche Photonique avaient pu voir l'étrange manège de Shinji. Et tous étaient complètement perdus quand à ce que le garçon venait de faire, certains l'attribuant même au choc.

Toji et Kensuke, eux, commençaient à se demander si leur ami n'était pas devenu fou.

« Je vais avoir besoin de vous. »

La voix de Shinji, bien que révélant sa fatigue, avait cependant pris une dûreté étrange qui prit de court Toji.

« - Hein ?
- Je ne sais pas si j'arriverais à atteindre l'Ange... Pas dans mon état actuel. Il faut que vous guidiez mon bras... Le bras de l'Eva... »

Kensuke jeta un oeil à Shinji, puis reporta son attention sur l'écran qui lui montrait l'étrange montage de Shinji... Et le déclic se fit.

« - Shinji, si jamais ça marche, tu auras droit à mon admiration éternelle !
- C'est quoi, cette histoire ? Dit Toji, qui commençait lui aussi à réaliser ce que Shinji s'apprêtait à faire. C'est complètement... C'est dingue ! Tu ne penses quand même pas...
- Je n'y pense pas, dit Shinji. J'y crois. Mais je ne peux pas y arriver seul... Il faut que vous m'aidiez.
- Comment ? Demanda Kensuke.
- Ouvrez votre esprit. Ecoutez ma voix et celle de l'Eva, puis concentrez vous sur notre cible. C'est notre seule chance.
- Mais enfin, c'est n'importe quoi ! Protesta Toji. Ça ne peut pas fonctionner !
- T'as une meilleure idée ? Dit Kensuke.
- Non, mais... »

Shinji mit un terme à ses jérémiades en faisant se redresser l'Eva-01 sur ses pieds, le bras coupé avec la lame fermement tenue dans sa main valide.

Chapitre 5 (10ème ET DERNIERE, YAHOU partie)

Misato vit l'Eva se relever. Sa réaction refléta l'état d'esprit qui assistait à ce spectacle.

« Mais qu'est-ce qu'il est en train de faire ?! »


« Pouvez vous le sentir ? »

Kensuke se concentrait aussi fort qu'il pouvait, essayant de trouver un lien entre son esprit et l'Eva. Malgré ses protestations, Toji, comprenant que de toute façon c'était cela ou la mort, abandonna ses jérémiades et se joignit à ses deux amis.

Au début, rien de spécial se passait.

Puis... Toji et Kensuke commencèrent à ressentir quelque chose... Un faible, très faible son qui semblait provenir du fin fond de leur esprit, mais qui ne venait pas d'eux-même. Un bruit parasite... Qui se précisait...

Cela ressemblait à un cri de bête... De rage, de douleur, de frustration... Quelque chose d'atroce, qui semblait appeler à la revanche... C'était de plus en plus fort, écrasant ce qu'il pouvait percevoir avec leurs sens normaux...

Mais ils perçurent autre chose. C'était beaucoup plus faible en intensité, mais cela résonnait d'une détermination écrasante. Une présence... Qui semblait maintenir la colère de la chose qui hurlait, malgré la différence de puissance...

Ils comprirent. Il tentèrent de se joindre à cette nouvelle force, afin de pousser la créature à mettre sa rage dans l'accomplissement d'un but précis. Plus les secondes passaient, et plus leur affinité avec ces êtres grandissaient.

L'Eva se tendit, son bras valide commençant à se reporter en arrière...

Les trois garçons se concentraient sur un point précis... Ils n'avaient qu'une seule chance.

Au paroxysme de cette union, la voix de Shinji résonna dans l'Entry Plug.

« JAVELIN PUNCH ! »

L'Eva lança son bras coupé avec toutes les forces qui lui restaient.


Kouji essaya une nouvelle fois de remuer, mais Shamshel l'avait plaqué au sol et le maintenait avec son poids. Il n'y avait plus rien qu'il ne semblait pouvoir faire, mais il continua encore et encore à se battre pour essayer de s'en sortir.

Les tentacules de l'Ange surgirent à nouveau, prêts à donner le coup de grâce. La bête se laissa à pousser un cri de victoire...

Qui se changea en cri de douleur lorsque la lame du Prog-Knife s'enfonça dans son dos, juste en dessous de sa tête. L'arme avait été lancée avec suffisamment de force pour s'enfoncer jusqu'à la garde dans la chair de la créature, si bien que le moindre de ses mouvements ne faisait qu'accroître les dégâts causés par l'arme.

Kouji sentit la pression qui s'exerçait contre Mazinger Z se réduire ; mobilisant toutes les forces de sa machine, il réussit à la dégager de l'étreinte de Shamshel, avant de lui faire face.

Il était temps d'en finir tant que la chose était trop distraite.

« RUST HURRICANE !!! »

Les turbines de Mazinger Z s'activèrent immédiatement. De la bouche de la machine surgit alors une bourrasque extraordinaire, qui frappa l'Ange sans que celui-ci ne puisse lui échapper. Le vent en lui-même ne lui causait aucun dégâts ; par contre, les particules corrosives qu'il charriait avec lui remplirent leur office. La chair de Shamshel commença à fumer alors qu'elle était en train de se dissoudre, la bête semblant se décomposer sur place couche après couche. Ses cris de douleur grandirent en intensité, s'ajoutant au hurlement du vent pour aboutir à un concert assourdissant.

A mesure que la bête se faisait ronger par le vent corrosif, sa structure interne se dévoila de plus en plus. Couche après couche, Kouji pouvait voir la peau de la bête disparaître, puis une bonne partie de ses muscles et de ses organes internes... Et au beau milieu, brillant sous le soleil de l'après-midi, le noyau rouge sang de l'Ange.

Mazinger Z plongea ses mains dans les entrailles de la créature et empoigna le noyau. Shamshel hurla de nouveau, mais toute sa force avait été aspirée par les blessures qu'il avait subi. Il n'opposa qu'une résistance de principe à la machine... Qui bientôt arracha le noyau de son corps.

« Ça se termine ici pour toi ! »

Le robot pressa le noyau entre ses deux mains. L'objet, sous ses doigts, se mit à se gondoler, à se déformer sous l'incroyable pression auquel il le soumettait...

Puis explosa dans une gerbe de liquide poisseux, aspergeant les bras et le torse de MazingerZ.

Shamshel se raidit brutalement, puis s'effondra bruyamment, faisant trembler le sol dans sa chute. Quelques convulsions... Puis il resta complètement immobile.

A travers les quelques filets de « sang » qui coulaient le long de son habitacle, Kouji observa le corps sans vie de son adversaire. Il devait admettre que le combat avait été quelque peu plus rude que ce qu'il aurait cru au départ ; il n'empêche qu'une nouvelle fois, ils avaient réussi. L'ennemi de l'humanité gisait à ses pieds, incapable de pouvoir le vaincre lui et...

Le souvenir de la blessure de Shinji.

« SHINJI ! SHIN... »

Il se stoppa.

L'Eva-01 marchait dans sa direction. Enfin, marchait... Il était plus correct de dire qu'il claudiquait et titubait vaguement vers lui. La machine ne semblait même pas prêté attention à son confrère... Kouji le vit se pencher sur le cadavre de Shamshel, et en retirer quelque chose... Il frissonna lorsqu'il vit qu'il s'agissait de son bras coupé, tenant toujours le Prog-Knife.

Et sous ses yeux ébahis, l'Eva-01 porta le morceau de bras au niveau de son moignon, et celui-ci se recolla en quelques secondes.

A ce moment-là, les réserves de l'Eva-01 s'épuisèrent enfin.

La machine s'effondra sur le corps de leur adversaire.

« SHINJI ! »



A SUIVRE...

Passionnant ! Palpitant ! Toute la bataille m'a tenue en haleine du début à la fin ! Tout y est parfaitement décrit, je suis bien arrivée à suivre le déroulement. Que puis-je dire de plus ? C'est superbe !

Je ne connaissais pas l'univers d'Evangélion et je suis en train de faire sa connaissance en ayant le très grand plaisir de suivre également les aventures de mon pilote préféré (= Koji Kabuto, naturellement).

Quelle excellente idée tu as eu de mêler ces deux univers !
Alcorine

Wow bravo!!!!!!

Quel miracle : je termine enfin un nouveau chapitre, et presque en même temps j'ai enfin un accès personnel à Internet !

Disclaimer : Neon Genesis Evangelion, Mazinger Z, et tous les personnages associés à ces deux franchises sont la propriété de leurs auteurs respectifs. Ce texte est juste une oeuvre de fan sans aucune visée lucrative.

Chapitre 6

Comme la fois précédente, les images de la bataille entre l'Ange et les deux machines firent le tour du monde.

Comme la fois précédente, elles déchaînèrent les passions.

Le public, les journalistes et, surtout, les Nations Unies exigèrent de l'Institut de Recherche Photonique d'expliquer pourquoi celui-ci avait caché qu'il était en possession d'une deuxième machine. La réponse qui leur fournit fut courte et très facilement acceptée : Aphrodite A n'était jamais sensé participer aux opérations, et ce ne fut que du fait de certains faits exceptionnels que ce qui ne devait être qu'un prototype laissé à rouiller dans un hangar fut finalement révélé à la lumière du jour. Bien sûr, l'armée protesta que vu l'état de guerre dans lequel se trouvait l'humanité toute entière, il était contestable de garder un atout de cette taille. Mais leurs reproches furent vite étouffés, ne serais-ce que du fait de la nature très différente des deux robots : si il fallait établir une comparaison, alors que Mazinger Z serait un char d'assaut, Aphrodite A ne serait qu'un camion. Pratique pour aider hors des combats, mais sans moyen d'y participer activement.

La population, dans son ensemble, n'eut cependant pas la même réaction que les officiels et les militaires. Elle réagissait de deux manières différentes : l'une qui pensait « Hé, cool, un troisième robot ! », l'autre qui se disait « Pourquoi ils y ont mis des nichons ? ».

D'une certaine manière, c'était rassurant de voir que l'humanité continuait d'avoir des pensées futiles en ces temps troublés.


Shinji aurait tout donné pour être ailleurs.

Après la bataille, il avait dû subir toute une batterie de tests médicaux pour s'assurer qu'il se remettait de toute la tension physique et mentale qu'avait exigé le combat contre Shamshel. Il s'en était sorti, finalement, avec une grande fatigue physique qui ne demanda que quelques heures de repos pour disparaître. Les médecins de la NERV s'étaient inquiétés de ce qu'il se soit évanoui juste au moment où les réserves d'énergie de l'Eva-01 étaient complètement vidées, craignant que cela n'indique une fusion mentale avec la machine trop importante, mais il apparut vite que ces craintes n'étaient pas fondées. Dès qu'il fut sorti de l'Eva, Shinji commença rapidement à se remettre de l'incroyable effort qu'il avait dû fournir. Il fut tout de même maintenu en observation quelques jours, le temps que les médecins pratiquent toute une série d'analyses.

Malgré tout, il se sentait maintenant beaucoup moins à l'aise que lorsqu'il était à l'hôpital.

La raison ?

Son fan-club.

Il ne voyait pas d'autres termes. Non, vraiment, à part « fan-club », il n'arrivait pas à trouver de qualificatif pour les dizaines d'élèves qui maintenant épiaient le moindre de ses gestes dans une sorte d'extase, voire qui parfois lui posaient des questions toutes plus insignifiantes les unes que les autres, juste pour pouvoir tout connaître de lui.

Une situation particulièrement embarrassante pour un garçon de 14 ans qui avait toujours tout fait pour ne pas apparaître sur ses propres photos de classe.

Un autre problème qui se posait était qu'il n'était pas le seul à susciter à ce point l'admiration de ses semblables... De manière tout à fait compréhensible, Kouji également commençait à voir se multiplier les admirateurs autour de lui ; à peu près la moitié de l'école. Lui semblait prendre la chose un peu mieux que Shinji, cherchant par moment à attirer un peu l'attention sur lui, mais il comprit très vite que cela allait finir par engendrer des complications dans leur vie quotidienne, surtout que celle-ci était déjà salement compliquée par leurs rôles de soldats. La démographie de ces admirateurs se dessina également très vite: Shinji semblait attirer les élèves les plus jeunes, ceux qui étaient de son âge, et Kouji les plus âgés. Une bonne proportion était formée d'effectifs féminins, ce qui pouvait accroître les difficultés pour Shinji à gérer la situation...

Il y avait un troisième fan-club, plus réduit, mais qui commençait à être encombrant : ceux qui suivaient Sayaka. L'identité de la pilote d'Aphrodite A avait très vite filtré, ne serais-ce qu'à cause de la vague de protestation que son apparition avait causé. Et dire qu'elle n'était pas franchement enchantée de cette situation était un euphémisme difficilement mesurable.

Mais ce qui inquiétait le plus Shinji était le fait que leurs camarades étaient déjà en train de se polariser. Il y avait les fans de Kouji, les fans de Shinji, et les fans de Sayaka, et les trois semblaient bien partis pour s'étriper pour déterminer lequel des trois était le meilleur pilote. A vrai dire, les fans de Sayaka étaient un peu laissés de côté dans cet argument, du fait qu'elle ne jouait clairement pas dans la même cour du fait des caractéristiques de sa machine ; mais le ton montait constamment entre les deux autres clans. Jusqu'ici les surveillants et autres délégués de classe avait joué un rôle actif pour rétablir la « paix civile », mais Shinji savait qu'il suffisait d'un rien...

Le jeune homme soupira. Il avait accepté de grimper dans l'Eva-01 pour protéger ceux qui en avaient besoin, pas pour servir de prétexte aux autres pour se battre.

« Hé, Shinji, t'es avec nous ? »

Shinji sortit de sa rêverie pour se concentrer à nouveau à la discussion en cours. Il hocha à l'attention de Kensuke et lui sourit. Autour de lui, Toji, Kouji et Sayaka semblait tous avoir remarqué son absence.

« - Oui, c'est bon, répliqua Shinji. J'ai dû décrocher un moment.
- On t'a déjà dit que parfois t'étais flippant ? Lui demanda Kouji. Un instant tu discutes avec nous, et l'instant d'après tu sembles faire une expérience astrale ou je ne sais trop quel truc qui te fait sortir ton esprit de ton corps !
- Désolé. Il y a beaucoup de choses qui me tracasse en ce moment.
- Ce n'est pas moi qui vais te le reprocher, dit Sayaka. Vu ce dans quoi on est embarqué...
- Tu t'es quand même légèrement embarqué dedans sans qu'on te le demande... »

Sayaka jeta un regard qui se voulait neutre à Toji, mais qui masquait mal sa colère. Après le combat avec Shamshel, le jeune homme avait grandement changé d'opinion quand aux pilotes de robot. Être placé à l'intérieur d'un de ces monstres et vivre tout ce qu'ils devaient subir pour que des ingrats comme lui puisse voir le soleil se lever le jour suivant était le genre d'expérience que tous ceux qui à travers le monde critiquaient le pilote auraient dû vivre pour que les pendules soient remises à l'heure. Mais il restait malgré tout toujours le Toji d'autrefois, qui avait tendance à parler plus vite qu'il ne réfléchissait. Et si il n'avait pas voulu être désagréable, le regard de Sayaka lui fit comprendre qu'il aurait dû sa formulation.

« - Tu peux répéter ? Dit Sayaka d'une inflexion qui pouvait se traduire ''vas-y, fais-le si tu oses''.
- Euh... Enfin... Je veux dire, Shinji et Kouji ont été plus ou moins forcés de partir se battre contre Shamshel, alors que toi, tu aurais pu rester à l'Institut et...
- Comme toi, tu aurais pu rester dans les abris ?
- Ben... Oui... Mais... Euh...
- J'aurais dû emporter mon caméscope... Murmura Kensuke en réprimant un sourire.
- Sinon, est-ce que ça se passe bien à l'Institut ? Demanda Shinji, plus pour sortir Toji de l'embarras que pour faire avancer la conversation. Le docteur Yumi s'en sort avec la JSSDF ?
- Oh, avec eux, ça a été vite réglé, plus vite que lorsque Kouji est intervenu contre le premier Ange, dit Sayaka. Par contre, il semblerait que ton père a fort peu apprécié notre intervention. »

Shinji se tut. Son père ? Cela ne le surprenait pas. Le peu qu'il l'avait fréquenté avait suffi pour qu'il se rende compte qu'il voulait tout contrôler autour de lui, sans supporter la moindre interférence. Alors que quelqu'un d'autre se montre aussi efficace que lui dans la lutte contre les Anges ne pouvait que le rendre furieux. Il sentait que cela pourrait causer de sérieux problèmes. Après tout, leur but final à tous était de protéger l'humanité. Aussi tyrannique qu'était Gendo, il n'allait tout de même pas oublier ce qu'ils devaient faire et saboter tout le projet.

N'est-ce pas ?


A l'écart du groupe, trois jeunes hommes en tenues noires essayaient d'observer les pilotes et leurs amis sans se faire repérer à leur tour. Pour des raisons que deux d'entre eux ne comprenaient pas.

« - Mais enfin, Boss, pourquoi on reste là plutôt que d'aller leur parler ? Demanda Mucha.
- Pour qu'on ait l'air d'idiots ? Répliqua Boss. T'as pas l'impression qu'on a pas suffisamment passé pour des guignols l'autre jour ?
- Ben, un peu, dit Nuke, mais ils nous ont quand même sauvé, non ? On pourrait au moins dire merci !
- J'ai dit merci ! Dit Boss.
- Ouais, il l'a fait ! Dit Mucha.
- Il a murmuré ''M'ci'' entre ses dents avant de s'enfuir à toutes jambes quand Sayaka l'a déposé ! Je crois pas que ça compte ! Dit Nuke.
- T'as pas été plus causant, je te signale ! Répliqua Mucha.
- Toi non plus !
- La ferme, tous les deux ! Intervint Boss. On y va pas et puis c'est tout ! Notre réputation souffre déjà qu'on ait été sauvé par une fille ! »

Les deux acolytes se regardèrent d'un air ahuri. Ah bon, ils ont une réputation ?

« - Ben quoi ? Dit Mucha. Tu voulais pas que Sayaka nous sauve ?
- Non ! Cria presque Boss.
- T'aurais préféré Kouji ou l'autre ?
- Oui ! » Boss se mit soudain à s'énerver, autant contre lui-même que contre ses deux amis. « Je veux dire... Non ! C'est juste que c'est déjà pas génial d'avoir dû être sauvé, mais c'est encore pire que ce soit Sayaka qui l'ait fait !
- Pourquoi ? »

Parce que ça le fait pas de se faire sauver par la fille qu'on aime et avec qui on veut sortir, lorsque normalement c'est au mec de sauver la nana !

Par une démonstration extraordinaire de self-control, Boss réussit à s'arrêter juste au moment où il allait dire cela. Ne restait plus que le plan B.

« - Parce que c'est pire, c'est tout !
- Bon, d'accord, dit Nuke qui se contenta de la réponse. Mais alors pourquoi on continue de les espionner, si on veut pas leur parler ou faire un truc avec eux ? »

Boss tenta de formuler une réponse, mais cette fois-ci, il dût reconnaître qu'il n'en avait aucune à offrir. Il est parfois difficile pour un être humain de déterminer quelle part de notre inconscient est à l'origine de certains de nos actes, même pour quelqu'un qui pourrait être nominé pour le prix Nobel, alors pour quelqu'un d'aussi simple que Boss...

Le jeune homme remua tout de même la question quelques instants dans son esprit avant de sortir la meilleure répartie qui lui venait à l'esprit.

« La ferme. »

Chapitre 6 (partie 2)

Ritsuko compila une dernière fois dans sa tête ce qu'elle avait pu recueillir de la bataille. Les résultats étaient assez surprenants. Le niveau de synchronisation entre Shinji et l'Eva-01 avait chuté après que l'être ait perdu son bras, mais lorsque le jeune garçon se prépara à accomplir son... Attaque (''Javelin Punch'' ? Sérieusement, qu'est-ce qui avait pu passer par la tête du garçon ?), celle-ci s'était mis à grimper avant d'atteindre des sommets jamais observés lors des simulations auxquelles s'était plié Shinji. La clé venait certainement de l'implication des deux jeunes hommes qu'il avait fait grimper dans l'Entry Plug. Le taux de synchronisation avait recommencé à grimper lorsque ceux-ci commencèrent à assister Shinji au combat.

C'était une piste qu'il fallait examiner. Employer plusieurs pilotes pour une seule unité Evangelion ne pouvait être une solution permanente, du fait de la procédure de création d'une de ces créatures qui ne pouvait qu'impliquer un lien très fort entre elle et son pilote désigné. Cependant, il était évident que Shinji avait trouvé la force de rétablir la liaison avec l'Eva et de se battre grâce la présence de personnes autour de lui. Cela lui avait donné un but, une raison de surmonter ses difficultés. L'autre élément qui se confirmait était qu'au moment où Shinji reprenait le contrôle, Kouji Kabuto subissait des difficultés et avait besoin d'aide.

Cela pouvait contrarier les plans de Gendo. Le chef de la NERV ne voyait en son fils qu'un simple outil, mais étant donné son rôle primordial en tant que pilote de l'Eva-01, négliger son état mental pourrait se révéler préjudiciable. Ritsuko était presque aussi vexée des succès de Mazinger Z que son supérieur, mais elle devait admettre que Shinji lui-même se débrouillait bien mieux que ce qu'ils avaient prévus du fait de la présence d'un « collègue » sur lequel il comptait et qui comptait sur lui. Quand à l'inclusion de Toji et de Kensuke dans l'équation... Elle s'était révélée bienvenue. Ils semblaient donner à Shinji une raison supplémentaire de se battre. Il se sentait encore plus impliqué qu'au début de toute cette sombre affaire.

Bref, la situation de Shinji s'arrangeait.

Restait la question des machines de l'Institut.

Le cas « Aphrodite A » semblait devoir rapidement être réglé : ce n'était apparemment qu'un simple soutien. La machine n'avait pas été placée en vraie situation de combat, même alors que l'Ange l'avait attaqué, mais Ritsuko ne pouvait pour le moment distinguer aucune caractéristique particulière... A part, bien sûr, le fait que l'on parlait d'un robot géant à forme féminine. Il faudrait tout de même surveiller l'emploi que l'Institut ferait de cette machine, lequel ne pourrait plus se contenter de la... Le laisser rouiller dans un hangar maintenant qu'il avait prouvé une certaine utilité.

La même chose ne pouvait être dite de Mazinger Z. La machine avait une fois de plus réussi à faire face à un adversaire face auquel il aurait dû n'être qu'un hors d'oeuvre. L'Ange n'avait jamais baissé son AT-Field de toute la bataille... Alors comment de simples attaques physiques et une bourrasque emplie de particules corrosives avaient-elles pu passer au travers et lui infliger de telles blessures ?

Gendo Hikari ne décolérait pas du succès insolent de Mazinger Z et cherchait la faille de la « boîte de conserve », comme il l'appelait malgré son désir quasi-mystique de conserver une apparence froide. Ritsuko, elle, commençait à voir ce rival comme un mystère beaucoup plus complexe que ce qui lui semblait au premier abord.

« Sensei ? »

La voix de Maya Hibuki la fit sortir de sa rêverie. Par moment, tous ces efforts mentaux la faisait décrocher du monde réel, au point qu'elle en oubliait son environnement immédiat.

« - Oui, Maya ?
- Le docteur Yumi est arrivé. Vous m'aviez demandé de vous le signaler dès que possible. »

Evidemment. Elle avait demandé à ce qu'il vienne. Officiellement, c'était au sujet des restes du dernier Ange. Alors que Sachiel, en se faisant exploser dans une dernière tentative pour éliminer l'Eva-01 et Mazinger Z, n'avait rien laissé derrière lui, le cadavre de Shamshel, lui, était disponible. Le Rust Hurricane de Mazinger Z avait sacrément endommagé sa structure, mais il restait tout de même suffisamment d'éléments que la NERV et l'Institut de Recherche Photonique pouvait étudier pour améliorer leur lutte contre les Anges. Il fallait, cependant, décider comment s'organiserait les analyses, et pour cela, il semblait plus poli d'en décider en tête à tête avec le directeur de l'Institut plutôt que par téléphone.

Il y avait une autre raison à cela : Ritsuko espérait pouvoir retirer certaines informations à propos de Mazinger Z. Plus elle instaurerait un climat de confiance avec Yumi, plus celui se révélerait loquace sur ce sujet.

« Ah, parfait. J'arrive tout de suite. »

Le temps de reposer sa tasse de café et de se rendre un peu présentable, Ritsuko sortit de la pièce à la suite de Maya et se dirigea vers la salle de conférences.

Yumi se tenait devant l'entrée de la salle, un gobelet en plastique à la main (très certainement du café, à en juger par la vapeur qui s'en échappait), l'air un peu perdu. Ritsuko pouvait comprendre : aussi loin qu'elle se souvienne, le docteur Yumi n'avait jamais mis les pieds dans les quartiers généraux de la NERV... Et la taille de l'édifice souterrain, sans compter l'incroyable dispositif de sécurité qui était déployé, produisait le plus souvent son petit effet sur ceux qui le découvrait.

Le visage du scientifique sembla s'illuminer lorsqu'il la vit arriver, ce qui marqua quelque peu Ritsuko. Il avait quelques années de plus qu'elle, ce qui n'enlevait rien au charme qu'il pouvait dégager et qui le distinguait grandement de la plupart des scientifiques mâles que Ritsuko avait pu côtoyé durant sa carrière. La joie qu'il semblait ressentir à cet instant renforçait le côté agréable de ses traits, mais elle marquait également un certain décalage avec l'attitude du scientifique. Il semblait en effet un peu nerveux, Ritsuko releva même quelques tics qui relevaient de ce genre d'état d'esprit. Elle décida, dans un premier temps, de mettre cela sur le compte de toute la pression qui lui était tombé dessus depuis que les plans de l'Institut avaient été révélés.

Il se débarrassa au plus vite de sa tasse de café dans une poubelle adjacente pour venir à la rencontre de Ritsuko. Il lui tendit immédiatement une main qu'elle serra sans se départir de son sourire amical. La poignée de main se révéla assez énergique, comme si il avait un peu de mal à la contrôler.

« - Bonjour, docteur Yumi. Je suis enchanté que vous ayez pu nous consacrer un peu de votre temps.
- Tout le plaisir est pour moi, répliqua le scientifique, qui lâcha enfin la main de Ritsuko. Je suis heureux que nous puissions enfin nous rencontrer face à face, plutôt que par écrans interposés.
- Moi de même. Je dois vous avouer qu'après toutes les... Surprises que votre Institut a pu nous réserver, j'étais assez désireuse de pouvoir vous rencontrer en personne.
- Nous sommes deux, en ce cas. »

Le docteur Yumi ponctua ce dernier échange par un sourire chaleureux. Ritsuko essaya de voir si celui-ci cachait quelque ressentiment dissimulé, ce qui ne l'aurait pas étonné étant donné la méfiance à l'égard de la NERV que le professeur Kabuto était réputé avoir instauré auprès de ses collaborateurs. Mais elle ne pouvait rien voir de tel. Apparemment, il semblait sincère.

« - Très bien. Je vous propose que nous commencions au plus tôt. Cela ne vous gêne pas que Maya nous seconde lors de cet entretien ?
- Absolument pas. Après tout, je suis seulement invité chez vous, n'est-ce pas ? »

Un autre sourire. Ritsuko remarqua qu'il faisait vraiment tout ce qu'il pouvait pour avoir l'air agréable. Une impression qui se renforça tout au long de l'entretien : Yumi était là en tant que dirigeant de l'Institut de Recherche Photonique, mais à côté de tout l'aspect officiel qu'une telle réunion pouvait inclure, le scientifique semblait également s'être fixé pour objectif de plaire à la jeune femme, ou du moins qu'elle n'ait pas une mauvaise opinion de lui. C'était tellement visible qu'à plusieurs reprises, Ritsuko dut se retenir pour ne pas éclater de rire. Difficile de penser que quelqu'un d'aussi démonstratif pouvait diriger une équipe scientifique, mais dès qu'ils rentraient dans des détails beaucoup plus professionnels, il prouvait sa valeur. Son champ d'expertise était fort différent du sien, mais il était particulièrement calé dans ce qu'il connaissait ; peu de temps fut nécessaire à Ritsuko pour comprendre pourquoi le plus grand expert en robotique du Japon l'avait choisi comme assistant. Et surtout, il apprenait vite. Sa machine ne s'était battue que deux fois face aux Anges, mais il tirait déjà des conclusions sur la marche à suivre pour les combattre très proches de ce qu'elle-même avait élaboré. Il prenait le combat contre les Anges très au sérieux, au point de la reprendre sur quelques points qui lui semblait essentiels.

Elle n'oubliait pas non plus son objectif d'en découvrir davantage sur le fonctionnement de Mazinger Z... Mais sur ce point, Yumi se montrait particulièrement réservé. Il n'était pas avisé de trop insister sur ce point, sous peine d'éveiller ses soupçons, mais aux quelques reprises où elle tenta de lui faire dire des précisions sur telle ou telle caractéristique du robot, il l'éludait aussi vite que possible, sans lui apprendre quoi que ce soit. Ritsuko ne voyait que deux explications : soit il était aussi méfiant que le professeur Kabuto l'avait été à l'égard de la NERV, et malgré son amabilité il ne lâcherait rien ; soit il respectait trop les volontés de son ancien maître et ami pour révéler ses secrets aussi rapidement. Peut-être même y avait-il des deux.

Après un peu plus d'une heure de négociations, Yumi accepta de laisser la NERV disséquer le corps de l'Ange, partant du principe que ses propres experts n'avaient pas réellement les compétences nécessaires pour examiner des êtres organiques, à la condition que la NERV leur révèle les informations qu'ils pourraient en tirer. Ritsuko accepta, bien qu'elle savait que Gendo Ikari aurait à redire à cet accord.

Soudainement, le téléphone portable du professeur Yumi sonna. S'excusant, il se leva et partit dans un coin de la pièce afin de pouvoir répondre.

Puisqu'il lui tournait le dos, Ritsuko ne pouvait voir son visage, mais le ton de ses réponses l'avertit immédiatement qu'il s'agissait de quelque chose de grave.

Une impression qui se renforça lorsque Yumi raccrocha et revint à côté d'elle. Le visage jusque là rayonnant du scientifique s'était brutalement assombri, tandis que son front se creusait de rides.

« - Un problème ? Demanda Ritsuko.
- Je... Crains que nous n'allions devoir discuter un autre moment des dernières modalités de notre collaboration. »

L'inquiétude de Ritsuko grimpa d'un cran.

« Pourquoi ? Que se passe-t-il ? »

Le docteur Yumi sembla hésiter une seconde... Puis il la regarda dans les yeux. Le doute et l'appréhension pouvaient s'y lire.

« C'était un appel de la police. Ils disent avoir de nouveaux éléments sur la mort du professeur Kabuto. »

Chapitre 6 (partie 3)

Shinji regarda le bâtiment face auquel il se tenait. Il jeta un coup d'oeil à l'adresse que Misato lui avait donné, puis releva la tête pour fixer l'immeuble. L'adresse concordait, mais quelque chose n'allait définitivement pas.

L'immeuble où habitaient Shinji, Misato, Kouji et Shiro était relativement bien entretenu, autant qu'il était possible dans un lieu manquant cruellement de personnel d'entretien. C'était en tout cas un lieu où, bien qu'il avait du mal à vraiment considérer comme sa maison, Shinji se sentait relativement incité à habiter. Et les environs étaient également assez calmes et sympathiques, reflétant un quartier tranquille qui ne semblait pas devoir abriter les pilotes de machines de guerre extraordinaires.

Mais l'immeuble de Rei ? Bon sang, non content d'être au beau milieu d'une friche urbaine tellement dévastée que Shinji s'attendait à voir rouler des boules de branchages mortes au milieu des avenues, il était lui-même complètement décrépit et en état d'abandon manifeste !

Pour essayer de réprimer son étonnement, il essaya de se concentrer sur ce qui l'amenait en ces lieux. La jeune fille, celle-là même pour laquelle il avait accepté de grimper dans l'Eva, sortait de convalescence après l'accident qui l'avait mis dans l'état lamentable dans lequel il l'avait rencontré (et sur lequel tout le personnel de la NERV restait mystérieusement silencieux) et était rentrée à l'appartement que la société lui avait donné. Cependant, en son absence, de nouvelles clés magnétiques d'accès avaient été fabriquées, et la jeune fille ne les avait toujours pas reçu. Estimant que cela constituerait une bonne occasion pour les deux pilotes de faire plus ample connaissance, Misato avait alors demandé à Shinji d'aller lui donner en mains propres ses nouvelles clés. En bon garçon obéissant, Shinji avait bien entendu accepté, mais une autre raison l'avait poussé à le faire. En effet, il ne cessait de s'interroger sur la jeune fille depuis qu'il l'avait vu ; Shinji n'avait du genre féminin aucune expérience à part la fréquentation distante des élèves féminines de ses classes successives, mais ces quelques secondes avait suffis pour lui laisser une impression étrange à propos de la jeune fille. Elle lui avait semblé... Différente. En bien ou en mal, impossible de dire, mais il se doutait qu'elle était aussi éloignée des autres filles qu'il avait rencontré que l'Eva-01 différait de Mazinger Z. Et une curiosité imparfaitement assumée le poussait à vouloir en apprendre plus sur elle.

Cette mise au point faite, rien cependant ne venait justifier que son père puisse laisser un pilote d'Evangelion vivre dans un lieu aussi décrépit et aussi peu sûr, surtout quand ledit pilote est une fille guère plus âgée que Shinji. Son père était-il à ce point insouciant vis-à-vis de la vie des autres que cela ne le gênait pas de la laisser dans un lieu aussi désert, sans défenses ? Ça ne semblait pas coller. Qu'il soit méprisant à l'égard des autres, il avait pu le remarquer, mais cela ne semblait pas aller à l'encontre des intérêts de ceux qui auraient pu lui être utile. Et Rei faisait vraisemblablement partie de cette catégorie. Il devait donc y avoir une autre raison, mais le jeune garçon n'arrivait pas à la concevoir.

Shinji se décida afin à pénétrer dans le bâtiment. Tout était ouvert, et comme l'extérieur l'indiquait, il n'y avait absolument aucun indice pouvant indiquer que quelqu'un habitait les lieux. En avançant dans le couloir, Shinji tendait l'oreille, mais il n'entendait rien d'autre que le souffle du vent et quelques grattements qu'il attribua à la présence de souris dans les environs. En tout cas, en appuyant sur le bouton d'ascenseur, il put découvrir que celui-ci fonctionnait, au-delà de toute attente même puisque lorsque les portes s'ouvrirent il découvrit un espace bien mieux entretenu que le reste du bâtiment. Le trajet jusqu'à l'étage où l'appartement de Rei se trouvait se déroula en un instant. Quelques panneaux présentaient l'agencement des appartements, permettant ainsi à Shinji de facilement trouver le logement de Rei. Il revérifia une nouvelle fois ; il était bel et bien arrivé. Il aurait eu du mal à le savoir autrement, rien ne distinguant cette porte des autres.

Il rangea le papier où il avait noté l'adresse dans sa poche, et en profita pour tâter le morceau de plastique qu'il était sensé remettre à la jeune fille. Bon. Et bien, il était inutile de s'attarder davantage... Ne voyant pas de sonnettes, Shinji frappa à la porte.

« Rei ? C'est Shinji. »

Aucune réponse. Shinji frappa à nouveau.

« Rei, est-ce que... »

La porte s'entrebailla.

Shinji resta circonspect. Il ne s'était pas préparé à ça ; et une pensée traversa son esprit. Que quelqu'un laisse sa porte grande ouverte, sans même la reclaquer correctement, indiquait soit que la personne en question était très maladroite, soit que quelque chose s'était produit. Partant de là, que devait-il faire ? Rebrousser chemin restait une option, mais il savait aussi qu'il devait s'assurer que rien n'était arrivé à la jeune fille, surtout considérant le quartier où elle habitait.

Il fallait qu'il rentre. Il s'était battu contre des Anges, il n'allait quand même pas avoir peur de ce qu'il pourrait trouver dans l'appartement, tout de même ?

…

Pourquoi fallait-il qu'il se pose des questions dont il connaissait la réponse à l'avance ?

Empoignant son courage à deux mains, Shinji ouvrit la porte en grand et rentra.

« Rei ? »

L'appartement était vide, pour ce qu'il en voyait. Une porte se trouvait sur sa gauche, mais il aperçu un lit dans la pièce en face de lui. Shinji referma la porte derrière lui et s'avança. Il se trouvait très certainement dans la chambre de la jeune fille. Une chambre à la décoration spartiate, pour ne pas dire rudimentaire. Le lit n'était qu'un lit d'hôpital, avec une table de chevet à côté ; le seul autre meuble présent dans la pièce était un simple meuble de rangement. Mais à part cela, absolument aucune décoration, aucune touche personnelle que l'on pourrait s'attendre à trouver dans la chambre à coucher d'une jeune fille, pas même un petit tableau au mur. En s'avançant un peu plus dans la pièce, Shinji vit un tas de bandages ensanglantés sur la table de chevet. Il eut un léger sursaut, mais il se souvint ensuite de l'accident qu'elle avait subi, aussi reprit-il facilement son calme.

Mais aucune trace de Rei.

Shinji s'apprêta à rebrousser chemin lorsque quelque chose attira son regard sur le meuble de rangement. Au-dessus, était posé un étui à lunettes ouvert, contenant une paire de lunettes. Intrigué, Shinji se rapprocha un peu plus... Et il remarqua alors la teinte orange des verres. Il n'avait dans sa vie croisé qu'une seule personne avec des lunettes d'une telle couleur, et il se trouve qu'il en partageait le nom et la moitié du patrimoine génétique.

Voilà qui le fit tiquer. Pourquoi Rei avait-elle cet objet en sa possession ? L'avait-elle pris à son père, ou lui avait-il donné ?

En attendant, il continua à fixer les lunettes. Puis, une bizarre pulsion le prit... Poussé par la curiosité, il prit les lunettes et les posa sur son nez. Sa vision ne s'en trouva pas altérée, si ce n'est au niveau de la perception des couleurs, évidemment. Donc, son père ne porte pas ses lunettes par nécessité optique... Il ignorait ce que cela pouvait bien révéler sur lui, mais il mit tout de même cette information dans un coin de sa tête.

Derrière lui, une porte s'ouvrit.

Shinji se retourna, les lunettes toujours sur le nez.

Rei le regardait alors qu'elle se tenait face à la porte à droite de l'entrée, se frottant les cheveux avec une serviette. Elle sortait visiblement de la douche.

Accessoirement, elle était entièrement nue.

Sonné, Shinji resta cloué sur place, la bouche grande ouverte. Toute capacité de réaction logique avait momentanément fuit son esprit, laissant la place à une stupéfaction qui l'empêchait de faire quoi que ce soit d'autre que regarder.

Réaction compréhensible. C'était la première fois de sa vie qu'il voyait un représentant du sexe féminin dans sa tenue de naissance.

Rei le regarda quelques instants, puis subitement, son expression jusque là neutre se durcit. Jetant la serviette derrière elle, elle marcha vers Shinji. Encore paralysé par la subite apparition de la jeune fille, Shinji ne réagit que lorsqu'elle ne se trouva plus qu'à quelques centimètres de lui. Elle fit un geste pour arracher les lunettes du nez de Shinji... Et tout à coup, les choses prirent une tournure un peu plus complexe. Lorsqu'il sentit le contact de Rei, il eut un mouvement de recul qui l'a déséquilibra. Et, lorsqu'elle tomba, en cherchant à se retenir, elle ne réussit qu'à entraîner Shinji avec elle. Cherchant à son tour à éviter de tomber de tout son poids sur le dos, le jeune garçon tenta de se redresser, sans succès...

Au final les deux jeunes personnes se retrouvèrent tous les deux à terre, face à face, Shinji se tenant au-dessus de Rei. Tous deux se fixèrent dans les yeux, Rei à nouveau complètement impassible, tandis que Shinji restait complètement en pilotage automatique.

« Retirez votre main. »

Le ton n'avait rien d'autoritaire, de courroucé ou d'outré, il ne faisait qu'indiquer une simple affirmation. Il réussit en tout cas à sortir Shinji de sa stupéfaction et à le pousser à prendre un peu plus conscience de ce qui l'entourait, ainsi que de sa position dans l'espace. Il finit par noter quelque chose de bizarre avec sa main droite... Il s'attendait à sentir la moquette qui recouvrait tout le sol de l'appartement. Au lieu de ça, ce qui se trouvait sous sa main était mou, chaud, et très doux. A vrai dire, c'était plutôt agréable au toucher...

Il regarda sa main et ce qu'elle touchait.

Shinji se redressa en bondissant en arrière, poussant un petit cri fort peu viril (sonnant un peu comme « Eeeek ! »).

hapitre 6 (partie 4)

Rei se remit à son tour sur ses pieds, puis lui tourna le dos pour ouvrir une armoire à côté de son lit et prendre à l'intérieur ce qui ressemblait à un uniforme de lycéenne. A aucun moment elle ne fit le moindre effort pour essayer de masquer sa nudité.

« Qu'est-ce qui vous amène ici, pilote Ikari ? »

Shinji finit enfin par reprendre le contrôle de son corps et se retourna brutalement pour ne pas la mater pendant qu'elle s'habillait. Sorti du choc initial, il se mettait maintenant à trembler de tout ses membres. Malgré tout, il se fit violence pour rester droit comme un i.

« - C'est... C'est... J'ai amené votre passe, et... Je... Je ne voulais pas... Je croyais...
- Oui ? »

Encore une fois, le ton était tellement neutre qu'il semblait absorber toute émotion dans les environs. Shinji ne put s'empêcher de jeter un coup d'oeil derrière lui. Rei avait enfilé sa tenue, mais elle ne l'avait pas encore totalement ajusté, si bien qu'il pouvait encore voir certaines de ses formes...

Il tourna sa tête si vite qu'il faillit se briser la nuque.

« - La... La porte était ouverte... J'ai cru que... Je ne sais... J'ai eu peur que...
- Il n'y a personne dans cet immeuble, répliqua simplement Rei, qui ne faisait qu'énoncer un fait. Et d'ordinaire, je ne reçois aucune visite.
- Mais... Il suffirait d'une fois pour que...
- Cela n'a pas d'importance. Vous pouvez vous retourner. »

Shinji obéit, un peu anxieux à ce qui allait se passer ensuite. Rei était maintenant revêtu de la même tenue que toutes les filles qui fréquentaient son nouveau lycée. Malgré cette tenue qui aurait pu l'aider à se confondre dans la foule, elle restait très singulière. Sa peau très pâle, ses cheveux d'un gris virant au bleu très clair et ses yeux rouges sang étaient déjà suffisamment frappants, mais à cela s'ajoutait une expression faciale complètement figée. Shinji ne distinguait rien, pas le moindre soupçon de réaction à la situation embarrassante qu'ils venaient de vivre, pas la moindre chaleur... Le vide. En un sens, c'était plus inquiétant qu'une explosion de colère. Quelque chose en elle la rendait si... A l'écart qu'il en ressentit un certain malaise.

Et malgré cela... Sans qu'il ne puisse se l'expliquer, elle lui inspirait également l'impression qu'elle avait besoin, malgré ses paroles, d'être protégée. D'une manière diffuse, il se sentait poussé à veiller à cela.

« Puis-je avoir mon pass ? »

Une demande polie, mais qui ne semblait avoir été prononcée que parce qu'on lui avait appris qu'il fallait demander la permission pour pouvoir prendre quelque chose. Encore un peu secoué, Shinji plongea la main dans sa poche et en sortit la carte. Rei la prit sans aucune cérémonie, ne prononçant qu'un « merci » tout ce qu'il y a de plus formel, avant de lui tourner le dos pour ramasser les lunettes de Gendo Ikari, qui était tombée sur le sol à cause de leur « accident ». Contournant Shinji, Rei partit les ranger dans leur étui.

Malgré le fait qu'il soit encore perturbé par ce qui venait d'arriver, Shinji se dit qu'il devait dire quelque chose. Rei avait l'air particulièrement étrange, restant exceptionnellement calme malgré les circonstances, et semblant limiter sa conversation au minimum socialement acceptable, mais il ne pouvait en rester sur cette impression désastreuse. En temps normal, il aurait profité de cet instant de paix relatif pour bredouiller une excuse quelconque avant de tourner les talons et de s'enfuir à toutes jambes...

Mais ça, c'est ce que le Shinji d'autrefois aurait fait. Pas celui qui avait combattu à deux reprises l'incarnation de la destruction aveugle et en était sorti vivant. Aussi gênante qu'ait été leur entrevue, ce n'était rien face à ce qui lui avait vécu sur le champ de bataille.

Il fit tout son possible pour se ressaisir et ne pas avoir une voix tremblotante.

« Tu ne devrais pas rester seule ici. »

Rei se retourna et le fixa, apparemment impassible. Rien dans son regard n'indiquait la moindre réaction.

« - Ce sont les ordres du commandeur Ikari. C'est l'appartement qui m'a été alloué par la NERV, aussi je dois habiter ici.
- Dans un coin aussi désert ? Ça ne te dérange pas ?
- Si c'est ce que veux le commandeur Ikari, cela ira.
- Mais enfin, il n'y a personne dans les alentours qui pourrait t'aider si tu as un problème ! Pas le moindre signe de présence des agents de la NERV dans le coin ! Si quelqu'un de mal intentionné vient ici, tu seras seule face à lui !
- Ça n'a pas d'importance qu'il m'arrive quelque chose. »

Jusque là, Shinji était encore penaud, mais les déclarations insensées réveillèrent quelque chose en lui. Quelque chose qu'il pouvait sentir autour de Kouji lorsque celui-ci s'énervait. Il l'avait déjà ressenti autrefois, mais cela était toujours resté contrôlé, il ne l'avait jamais laissé s'exprimer. De la colère. Pas contre elle directement... Mais réclamant tout de même de s'exprimer.

Pour la première fois de sa vie, il n'essaya même de retenir ce qui brûlait de sortir.

« - Si, ça a de l'importance ! Comment tu peux à ce point ne pas te sentir vulnérable ici ? Comment tu peux rester aussi calme lorsque tu dis des choses pareilles ?! Bon sang, je rentre chez toi comme un voleur pour te trouver nue, et tu ne te demandes même pas ce qui te serait arrivé si c'était quelqu'un d'autre que moi qui étais rentré !?
- Je sais ce qui se serait produit, répliqua-t-elle d'un ton aussi plat qu'auparavant. Cela n'aurait de toute manière pas...
- NON ! »

Le cri que poussa Shinji sembla avoir réussi à affecter superficiellement la jeune fille. Un rapide haussement de sourcil de celle-ci trahit un accès de surprise très léger, mais qui suffisait à trancher de son attitude indifférente.

« - Ne t'avise pas de terminer cette phrase, Rei ! Cela aurait été très grave, et tu le sais très bien ! Tu n'as rien à faire ici, seule et démunie !
- C'est ce que votre père souhaite.
- Je me moque de ce qu'il souhaite ! Ce qu'il te fait est inacceptable ! Tu dois habiter avec nous, dans un quartier normal ! Dès demain, je vais aller voir mon père et je l'obligerais à ce qu'il te fasse emménager dans le même immeuble que Misato, Kouji et moi !
- Il refusera. Et il ne vous écoutera pas.
- Alors pourquoi tu te laisse faire ainsi ?
- Je dois lui obéir. Je lui dois cela. »

Et soudainement, la colère de Shinji, de brutale et directe, devint soudain plus diffuse et, surtout, tempérée par un sentiment d'inquiétude. Il réalisa tout à coup que la situation de Rei était beaucoup plus préoccupante que ce qu'il craignait. La flamme qui s'était allumée dans ses yeux s'étouffa en l'espace de quelques secondes.

« Mon Dieu... Qu'est-ce que mon père t'a fait, Rei ? »

La jeune fille sembla considérer sa question... Puis, son attitude indiqua que la conversation venait de s'achever. Elle indiqua d'un geste la porte de son appartement.

« Mieux vaut que vous partiez, pilote Ikari. Il va bientôt faire nuit, et vous risquez d'avoir du mal à retrouver le chemin. »

Pas la moindre colère. Pas d'inflexions signifiant un ordre. Juste l'énoncé d'un fait. Shinji voulut protester, mais il comprit que, pour le moment, il ne pouvait rien faire de plus pour elle. Abattu, il se dirigea vers la sortie en poussant un soupir.

« Ferme au moins la porte à clé derrière moi. »

Rei opina, mais conserva son expression impassible. Elle l'accompagna tout de même jusqu'à la porte, et posa une main sur celle-ci pour la refermer.

Sans prévenir, Shinji lui prit la main.

Etrangement, cela sembla l'affecter plus que lorsqu'il lui attrapa involontairement le sein. Il la fixa d'un regard empli d'inquiétude et de souci.

« Rei, écoute... Si jamais tu as besoin d'aide, viens me voir, d'accord ? N'hésite pas à m'appeler. Je serais toujours là pour toi. »

La jeune fille sembla hésiter. Shinji eut la sensation qu'elle faisait face à une situation à laquelle elle n'avait pas été préparée... Mais de cela, il ne pouvait en être sûr, car elle était particulièrement douée lorsqu'il s'agissait de masquer ses sentiments. Elle ne sembla pas non plus s'émouvoir lorsqu'elle lui répondit.

« J'irais bien. Ne vous inquiétez pas pour moi. »

Rei referma la porte derrière Shinji, le laissant perdu quand à ce qu'il devait faire. La mort dans l'âme, il choisit finalement de rentrer chez lui. Alors qu'il commençait à refaire tout le trajet en sens inverse, il essayait de trouver une manière d'aider la jeune fille, mais il fut forcé d'admettre qu'il ne pouvait rien faire. Aussi incroyable qu'était son statut de pilote, il ne lui donnait aucune autorité, encore moins sur une personne au même niveau que lui. Comme il l'avait dit à Rei, il aurait pu aller se plaindre à son père (et il allait certainement le faire), mais il était fort peu probable que celui-ci accède à sa requête. Un autre élément à prendre à compte était l'évidente indifférence de Rei sur son propre sort. Elle ne semblait pas vouloir essayer d'améliorer sa situation, ce qui limitait fortement sa propre marge de manoeuvre : comment pouvait-il espérer la sortir de ce lieu sordide si elle même ne le souhaitait pas ?

Le reste de la soirée fut particulièrement morose. L'humeur assombrie par son impuissance, Shinji ne fut pas d'une compagnie particulièrement agréable. Il resta comme toujours poli et attentif aux sollicitations de Misato, mais sans non plus y mettre d'enthousiasme ; et c'est à peine si il discuta avec l'officier. Misato tenta bien de lui faire dire comment s'était passé son entrevue avec Rei (avec une mine et un ton enjoué qui sous-entendait qu'elle s'attendait à le voir rougir du fait de quelques détails croustillants qu'il n'oserait pas lui dire), mais Shinji éluda au plus vite la question. La jeune femme comprit vite que quelque chose tracassait le jeune homme et qu'il ne voulait pas en parler, aussi finit-elle par abandonner son idée de le taquiner pour reprendre une attitude un peu plus mûr. Au final, fatigué et abattu, Shinji partit se coucher encore plus tôt que d'habitude.

Lorsqu'il ferma enfin les yeux, ce fut pour voir Rei nue.

Misato dut intervenir pour qu'il cesse de se cogner la tête contre les murs.

Chapitre 6 (partie 5)

Kouji et le docteur Yumi pénétrèrent en même temps dans le commissariat de police. Tokyo 3 était encore une ville relativement jeune, mais cela n'avait pas empêcher le bâtiment de faire partie des premiers à être sorti de terre. La NERV avait d'ailleurs mis les bouchées doubles pour qu'il soit le plus rutilant possible ; après tout, il fallait montrer à la population qu'elle prenait la sécurité des habitants de la ville à coeur, comme celle de l'humanité prise dans son ensemble, d'ailleurs.

Kouji avait commencé à harasser de questions le scientifique lorsque celui-ci était passé le prendre, mais il avait abandonné très vite lorsqu'il était devenu clair qu'il en ignorait autant que lui sur les raisons qui pouvaient avoir poussé le commissaire en personne à les convoquer.

Tous les deux se dirigèrent immédiatement vers l'accueil, où un jeune préposé remplissait quelques formulaires. Ce dernier leva les yeux de son travail d'un air las lorsque Kouji s'adressa à lui... Une expression de surprise apparut vite, cependant, lorsqu'il reconnut le pilote de Mazinger Z. La célébrité soudaine de celui-ci avait souvent engendrée ce genre de réaction.

« - Excusez moi, je suis Kouji Kabuto, et voici le docteur Yumi. Le commissaire nous a fait venir à propos du meurtre de mon grand-père.
- Très bien, attendez une minute... »

Le fonctionnaire décrocha le téléphone et appela son supérieur en interne pour avoir confirmation. Lorsqu'il la reçut, il invita Kouji et le docteur Yumi à s'asseoir en attendant qu'on vienne les chercher. Tous deux, respectivement nerveux et anxieux, restèrent plantés debout devant lui.

Enfin, deux individus sortirent d'un couloir et vinrent à leur rencontre. L'un était un homme ayant apparemment atteint la cinquantaine, ses cheveux prenant une teinte poivre et sel, tandis que le second, plus jeune mais sans non plus sembler un jeunot, dissimulait son regard derrière des lunettes noires. Kouji se dit immédiatement qu'il n'avait rien d'un policier ordinaire.

« - Enchanté de faire votre connaissance, dit l'homme entre deux âges en serrant la main du docteur Yumi. Je suis le commissaire Date, en charge du district de Tokyo 3 Nord, et voici l'agent spécial Kyriu.
- Bonjour, dit simplement l'agent Kyriu. »

Le docteur Yumi serra la main qui lui avait été présentée, mais lorsqu'il entendit les termes ''agents'' et ''spéciaux'', il se tendit quelque peu. Kouji, lui, se mit immédiatement sur la défensive. Si l'affaire nécessitait la présence de services spéciaux, c'est que celle-ci revêtait une gravité plus importante que ce qu'ils craignaient.

« - Et je suppose que vous êtes Kouji Kabuto ? Dit le commissaire Date à l'encontre du jeune homme.
- Exactement.
- Avant toute chose, enchaîna Date, laissez moi vous féliciter pour ce que vous faites. Il y a pas mal de personnes ici qui vous sont reconnaissants.
- Merci beaucoup, répliqua Kouji, mais il me semble que nous sommes tous ici pour parler de ce qui est arrivé à mon grand-père. »

Date acquiesça, bien conscient du problème. Derrière lui, Kyriu restait parfaitement impassible.

« Vous avez tout à fait raison... Et il est de toute manière hors de question de faire traîner cette histoire. Si vous voulez bien nous suivre... »

Kouji et le docteur Yumi emboîtèrent le pas de Date et de Kyriu, qui les amenaient dans une simple salle aveugle, dotée d'un poste de télévision et d'un lecteur de DVD. Une petite table, assez grande, cependant, pour eux quatre, se tenait face à l'appareil. Kyriu ferma la porte dès que Kouji et Yumi entrèrent. Le jeune homme nota que l'agent s'était assuré auparavant que personne ne se trouvait dans le couloir.

Date prit place et invita Kouji et Yumi à s'asseoir. L'agent Kyriu, lui, restait debout prêt de l'appareil, qu'il alluma. Le commissaire prit ensuite la parole.

« - Bien... Pourriez vous nous rappeler dans quelles circonstances le professeur Kabuto est-il décédé, docteur Yumi ?
- Un accident absolument regrettable, déclara le scientifique, visiblement encore désolé de ce qui s'était passé. Nous étions en train de finaliser les cellules photoniques qui allaient ensuite être intégrées dans les yeux de Mazinger Z, ces mêmes cellules qui permettent à la machine de produire les Kyouretsu Beam. Nous avions remarqué certaines fluctuations de puissance lors des derniers essais, aussi le professeur Kabuto avait décidé de chercher à les réparer, puisqu'il s'estimait le plus à même de découvrir l'origine de ces perturbations. Mais... »

Le docteur Yumi s'interrompit un instant. En regardant son visage, Kouji comprit soudain que le scientifique avait assisté à la mort de son grand-père, et que se remémorer l'accident lui était difficile.

« … Quelque chose tourna mal. Les cellules étaient hors tension, mais il semblait qu'elles avaient malgré tout conservé une certaine quantité d'énergie lors des essais... Et alors qu'il était en train de les manipuler, elles émirent une brutale décharge photonique. De faible ampleur comparé à ce qu'elles peuvent engendrer, mais plus que suffisante pour le blesser grièvement. Nous avons immédiatement appelé les secours, mais le professeur était décédé avant même qu'une ambulance n'arrive. Nous n'avons rien pu faire pour le sauver. »

Date opina. Kouji ne put s'empêcher de se demander dans quel sens il devait prendre ce simple hochement de tête.

« Très bien, dit soudainement Date. Votre version des faits semble correspondre à notre enquête. Cependant, il y a quelque chose que nous avons découvert qui en modifie la teneur. Ce n'était pas un accident. C'était un meurtre. »

Si le commissaire Date voulait les faire réagir il avait très certainement atteint son but. Kouji et le docteur Yumi se regardèrent avec des yeux écarquillés, se demandant tous les deux si ilsavaient bien entendu ce que venait de dire l'officier de police. Ce fut Kouji, cependant, qui réagit le plus vite.

« - Quoi ?! Qu'est-ce que voulez dire, un meurtre !?
- Nous avons examiné les cellules ayant causé l'accident mortel ; vous vous souvenez certainement, docteur, que vous nous les avez fournis immédiatement après l'accident pour que nous puissions mener notre enquête. » Le docteur Yumi acquiesça. « Et bien, nos experts scientifiques ont relevés sur les cellules quelques traces d'ADN relativement fraîches, lesquelles ne correspondaient pas à celui du professeur Kabuto, ce qui impliquait que quelqu'un les avait déjà manipulé peu de temps avant que les test ne soient effectués. Le plus perturbant, cependant, est venu des consultants en électronique que nous avons consulté.
- Ils ont trouvés quelque chose ? Demanda le docteur Yumi.
- Oui. Apparemment, d'après les renseignements que vous nous avez fournis, les cellules sont dotées d'accumulateurs permettant de conserver une partie de l'énergie qui leur est fournie afin d'éviter que celles-ci ne se trouvent à plat de manière impromptue en période de combat. Cependant, ces accumulateurs étaient déconnectés pour les tests. C'est bien cela ?
- En effet, répondit le scientifique, se demandant où est-ce que l'officier voulait en venir.
- Les consultants ont découvert que ces accumulateurs ont sciemment été modifiés de manière à ce que, en toute circonstance, une petite quantité d'énergie soit toujours présente. La modification a également eu pour but que la moindre manipulation des cellules ne déclenche leur libération immédiate. »

Il fallut quelques secondes aux deux anciens proches du professeur Kabuto pour digérer les informations, mais si Kouji, au contraire du docteur Yumi, ne comprenait pas toutes ces informations techniques, il voyait très bien, en revanche, ce que cela impliquait.

« - Un sabotage...
- Exactement. Pendant un temps, nous avons pensé à une malencontreuse négligence, mais les manipulations sont beaucoup trop élaborées pour résulter d'une simple erreur, et surtout trop pointues pour être le fait de quelqu'un n'y connaissant rien en la matière. C'était délibéré.
- Est-ce que vous savez qui a fait ça ? »

Le commissaire Date et l'agent Kyriu reportèrent leurs regards sur le jeune homme. N'importe qui pouvait voir la fureur qui était en train de couver chez le jeune homme. La mort de son grand-père l'avait bouleversé, bien entendu, mais alors que tout le monde avait pensé qu'il s'était agi d'un accident, jamais il n'avait blâmé l'Institut. Sans doute comprenait-il que cela faisait malheureusement partie des évènements pouvant se produire lorsque l'on travaille sur des projets extrêmement sensibles.

Mais si il s'agissait bel et bien d'un meurtre... Alors il fallait que quelqu'un paie.

Et tous les adultes se doutaient que si on lui en donnait l'opportunité, il s'en chargerait lui-même.

« - Nous y venons, répliqua le commissaire Date. Lorsque nous avons fait ces découvertes, vous avez dû affronter votre Premier Ange. Etant donné le rôle que vous et la création de votre grand-père jouez maintenant dans la défense de la planète, les services spéciaux, qui ont eu vent je ne sais comment de nos découvertes, ont estimé nécessaires de s'intégrer à l'enquête. D'où la présence de l'agent Kyriu ici.
- Nous avons repris l'enquête à partir de ce point, enchaîna l'agent spécial. Nous nous sommes attaché dans un premier temps à enquêter sur tous les membres de votre personnel capables de réaliser des manipulations aussi complexes. Cela vous incluait d'ailleurs, docteur. »

Yumi ne put s'empêcher de se crisper. Il n'avait jamais eu que du respect pour le professeur Kabuto, et malgré cela, on l'avait soupçonné... Sa part rationnelle, cependant, lui signala que c'était parfaitement compréhensible, étant données les circonstances et la gravité du crime, qu'ils aient examiné toutes les pistes.

« - Malgré cela, il semblait que tout le personnel scientifique de l'Institut n'avait rien à se reprocher. Tous ont un profil psychologique stable – à l'exception peut-être de Muneshira, mais il s'agit plus d'excentricités que d'intentions criminelles, aucun n'avait de rancoeurs particulières à l'encontre du professeur, aucun ne semblait appartenir à des groupuscules terroristes...
- Alors qui ? Dit Kouji qui s'impatientait de tous les détours que prenait l'agent.
- Les membres de l'équipe scientifique n'avaient rien à se reprocher. Mais un de nos collaborateurs a eu l'idée d'étendre l'enquête au personnel manutentionnaire, et en particulier aux salariés d'entreprises extérieures à l'Institut. Agences d'entretiens, de livraisons, jardiniers... Et nous avons finalement mis la main sur un suspect. »

Le commissaire Date présenta une photo à Kouji et Yumi. Elle représentait un homme chauve, apparemment dans la jeune quarantaine, et malgré tout doté d'un physique quelconque.

« - Hideo Setsuki, enchaîna le commissaire. Employé de la société de nettoyage de nuit avec laquelle l'Institut a contracté. Et, accessoirement, docteur en physique nucléaire diplômé de l'Université de Tokyo.
- Docteur en... ?! Dit Kouji. Qu'est-ce qu'il fout à balayer des couloirs !?
- Notre enquête nous a permis de découvrir qu'il avait en fait très récemment intégré l'entreprise en temps qu'intérimaire. Le docteur Setsuki avait disparu de la circulation 8 mois avant sa réapparition dans cette entreprise, sa famille avait même lancé un avis de recherche à son encontre. Et, comme par hasard, il avait démissionné de cette même entreprise peu de temps après la mort du professeur Kabuto. »

Le docteur Yumi comprit très vite ce que cela impliquait.

« - Arrêtez moi si je me trompe... Setsuki a été envoyé en temps qu'assassin afin de provoquer un accident qui serait fatal pour le professeur Kabuto ?
- C'est notre conclusion la plus vraisemblable, en effet. Nous avons réussi à le cueillir alors qu'il allait à nouveau disparaître dans la nature, et nous l'avons amené dans nos locaux pour interrogatoire.
- Et alors ? »

L'agent Kyriu ne répondit pas, mais son air jusque là impassible disparut pour laisser de la place à une certaine gêne. Date aussi sembla le remarquer, sauf que quelque chose dans son attitude aindiquait pourquoi l'agent spécial avait changé à ce point. L'agent Kyriu, en tous les cas, alluma le poste de télévision.

« Nous avons filmé l'interrogatoire. Il est suffisamment éloquent. »

Intrigués, Kouji et le docteur Yumi se tournèrent sur leurs chaises afin de mieux pouvoir regarder la retransmission.

Après quelques secondes de parasites, l'image se stabilisa pour montrer une banale salle complètement blanche, ressemblant beaucoup, pour être honnête, à la pièce que les quatre individus occupaient à l'instant. Au milieu, deux personnes assises se faisaient face, séparées par une simple table. L'une était un homme en costume noir, relativement jeune et ayant devant lui un dossier, l'autre n'était autre que Setsuki. L'agent d'entretien – docteur en physique se tenait tête baissée, avachi sur sa chaise.

« Monsieur Setsuki, demanda l'homme en costume, pour quelle raison avez vous modifié les équipements sur lesquels travaillait le professeur Kabuto ? »

Setsuki restait silencieux. L'agent ouvrit le dossier.

« Nous savons que vous avez touché aux cellules photoniques, monsieur Setsuki. Votre ADN correspond à celui relevé sur les équipements. Aviez vous l'intention de tuer le professeur Kabuto ? »

Le silence s'installa à nouveau quelques instants. Mais alors que l'agent s'apprêtait à poser une nouvelle question...

« Oui. »

Sur la vidéo, l'agent releva la tête.

« - Vous avouez qu'il s'agissait d'un homicide ?
- Oui.
- Avez vous agi sur ordre ?
- J'ai agi pour satisfaire la volonté de mon maître.
- Votre maître ? Quel est son nom ?
- Il est mon maître, il est le vôtre, et bientôt, il sera nous. »

Kouji commençait à se sentir un peu mal à l'aise. Setsuki continuait à parler la tête baissée, mais sa voix commençait à vibrer d'une façon peu rassurante.

« - Quel est son nom ? Reprit l'agent sur la vidéo.
- Il sera le maître de l'humanité, car il sera l'humanité, et un nouvel âge d'or se lèvera alors sur la Terre. Son nom sera synonyme de gloire.
- Et en attendant, quel est son nom actuel ? »

Setsuki releva enfin sa tête... Et l'image était suffisamment claire pour que l'on puisse voir qu'il retroussait ses lèvres comme un chien enragé.

« Misérable incroyant... Vous n'êtes pas digne de le prononcer... Mais en attendant que vous connaissiez l'illumination, vous feriez mieux de trembler au nom du Docteur Hell. »

Le docteur Yumi sursauta. Kouji lui-même ne put s'empêcher de réagir lorsqu'il entendit le nom de l'individu contre lequel son grand-père l'avait mis en garde dans la lettre qui avait précipité son départ pour Tokyo 3. Regardant le scientifique qui l'accompagnait, Kouji remarqua que son visage affichait maintenant une forme certaine d'incrédulité.

« - Est-ce ce docteur Hell qui a ordonné la mort du professeur Kabuto ? Continuait l'agent sur la vidéo, visiblement peu impressionné par les paroles du suspect.
- Le professeur Kabuto était un chien qui s'opposait à la gloire de mon maître ! Cracha Setsuki. Un hérétique qui osait vouloir empêcher la réalisation de ses grands projets ! Il devait mourir ! »

Setsuki commençait à particulièrement s'énerver, ce qui allait très semblablement posé problème à l'agent qui menait l'interrogatoire.

« - Veuillez rester calme, monsieur Setsuki, autrement...
- Vous ne pouvez rien me faire ! Continua le forcené, qui s'était levé de sa chaise pour hurler à la face de l'agent. Comme ces fous à l'Institut de Recherche Photonique et à la NERV ne pourront rien contre mon maître ! Les Anges eux-mêmes ne sont que des jouets pour lui ! VOUS NE POURREZ RIEN FAIRE !!! »

A cet instant de la vidéo, plusieurs autres agents apparurent à l'écran, se jetant sur Setsuki afin de le maîtriser. Mais être plaqué au sol par trois agents ne semblait pas devoir calmer sa crise de folie ; au contraire, ses hurlements devint plus sonores qu'auparavant, tandis qu'il se débattait comme un lion, cherchant à tout prix à se maintenir debout.

« PLIEZ VOUS A SA VOLONTE, OU DISPARAISSEZ DANS L'OUBLI ! SES ENNEMIS SERONT ECRASES PAR SA VOLONTE ! NOUS SOMMES HELL ! NOUS SOMMES HELL ! NOUS SOMMES HE... »

Un brusque éclair de lumière emplit l'écran pendant une fraction de seconde, puis l'enregistrement laissa la place à de la neige. L'agent Kyriu, toujours imperturbable, se contenta d'éteindre l'appareil.

Chapitre 6 (partie 6 et fin)

Pendant quelques instants, Gennosuke Yumi et Kouji restèrent silencieux, plus ou moins pétrifiés par ce qu'ils venaient d'assister. Il fallut quelques instants au jeune garçon pour reprendre la parole.

« - Qu'est-ce qui s'est passé ? Ce truc, tout à la fin ?
- Un... Accident, dit l'agent Kyriu. Le docteur Setsuki a soudainement explosé. »

Le choc qu'éprouvèrent les deux témoins était à la mesure de l'énormité de ce qui venait d'être dit.

« - Explosé ?! S'exclama Yumi.
- Le docteur Setsuki avait une bombe implantée dans son organisme. En examiner les restes fut très difficile du fait de la déflagration, mais nous supposons qu'elle a été activée par un signal mental, très certainement la répétition de la phrase ''nous sommes Hell''. Tous les agents présents dans la pièce lorsque cela se produisit furent tués sur le coup. »

Kouji dut se retenir pour ne pas se lever de cette chaise et se mettre à hurler. A ce moment précis, il ressentait un curieux mélange de stupéfaction, de rage, d'indignation et de solitude. Il n'en revenait que quelqu'un puisse aussi aveuglément décréter qui doit mourir autour de lui, et dans le même mouvement s'en sortir en causant encore plus de souffrance.

« - Je comprends maintenant pourquoi cette affaire vous tient à coeur... Dit le docteur Yumi d'un air sombre.
- Et le docteur Hell ? Dit Kouji, dissimulant très mal sa colère. Est-ce que vous savez où il se cache ?
- Absolument pas, répliqua l'agent Kyriu. Toutes nos recherches ont été vaines, pour le moment. A vrai dire, nous n'étions même pas sûr qu'il soit vivant. Nous manquons encore beaucoup d'informations sur sa psychologie, et c'est pour cela que nous vous avons contacté, docteur Yumi. »

Le scientifique resta silencieux, mais Kouji, de son côté se mit à le fixer comme si il était nez à nez avec un fauve. La mine du docteur Yumi s'était en tous les cas particulièrement assombri, et Kouji avait du mal à concevoir ce que les paroles de l'agent spécial signifiait.

« Vous le connaissez ? »

Gennosuke soupira. Mauvais signe, pensa Kouji.

« Ton grand-père et moi avons travaillé avec lui sur l'île de Bardos. »

Kouji resta figé sur place, déconfit. De leur côté, Date et Kyriu, eux, restaient stoïcs, apparemment au courant de cet état de fait.

« - Quoi ? Se contenta de dire Kouji, toujours sous le choc.
- Il est sans doute temps que tu en apprennes plus sur Bardos... Et vous aussi, je suppose ?
- Nos informations sur ce qui se trouvait sur cette île sont très floues, répliqua Kyriu. Tout a été caché par la NERV. »

Gennosuke opina, peu étonné par cette information.

« - Très bien. En ce cas, autant reprendre depuis le début... Bardos est une petite île située dans la mer Egée, au large de la Grèce. Elle était inhabitée malgré sa taille conséquente du fait qu'elle était particulièrement escarpée en son coeur, mais un jour, des plaisanciers qui s'y étaient arrêtés pour réparer quelques avaries mineures reportèrent avoir découvert des grottes menant profondément sous terre. Quelques relevés effectués par les satellites de la NERV indiquèrent quelques résidus énergétiques, aussi une expédition fut montée conjointement par la NERV et l'Institut. Elle comptait notamment le professeur Kabuto, Gendo Hikari, l'actuel dirigeant de la NERV, moi-même... Et le docteur Hell. Ce dernier était à l'époque déjà connu pour ses théories étranges sur la capacité de dominer des formes organiques par le biais de composants électroniques, mais il restait un scientifique reconnu dans le domaine de la manipulation énergétique, du fait de sa collaboration avec le professeur Fuyutsuki sur ce qui serait appelé aujourd'hui l'AT-Field. Sa présence était dès lors incontournable. Bref, nous partîmes explorer les profondeurs de Bardos à la recherche de ce qui pouvait bien engendrer ces relevés énergétiques. Mais malgré toutes nos préparations, nous ne nous attendions pas à ce que nous allions trouver...
- De quoi s'agissait-il ? Demanda le commissaire Date.
- Des ruines d'une antique civilisation, réfugiée sous terre pour des raisons que je présenterais plus tard. Une gigantesque cité à l'architecture hellénistique, dont la superficie dépassait celle de l'île sous laquelle se trouvait ses accès ; elle était en effet située très profondément sous la croûte terrestre, à certains points, à plus de 150 mètres sous la surface. Tout le long de la voûte étaient accrochés de titanesques photophores qui éclairait toute la ville aussi clairement que si elle était en plein jour. Nous ignorons encore ce qui pouvait bien fournir en énergie ces photophores. »

Gennosuke sembla se rendre compte que ses interlocuteurs le regardaient d'un air incrédule. Cela ne le surprit guère ; l'une des raisons pour lesquelles il avait accepté de cacher l'existence de la civilisation de Bardos était que personne n'aurait pu le croire.

« - Vous vous rendez compte que c'est un peu difficile à avaler... Dit l'agent Kyriu.
- Je sais, soupira le docteur Yumi. Mais c'est la vérité. Encore aujourd'hui, j'ai du mal à croire que je n'ai pas halluciné tout ce que j'ai vu.
- Et ensuite ? Dit Kouji, plus conciliant. Quel rapport entre Bardos et Mazinger Z ? Grand-père m'a expliqué dans sa lettre que ce qu'il y a trouvé l'a poussé à le construire...
- Il n'y avait pas que des bâtiments, reprit Gennosuke. Nous avons aussi découvert les restes des gardiens de la ville... Aux abords de celle-ci, se trouvaient les carcasses de dizaines de machines humanoïdes, hautes d'une trentaine de mètres. »

Les réactions furent variées, mais toutes marquées par la surprise. Kouji fut celui qui réagit le plus violemment en se levant brutalement de sa chaise.

« - Quoi ?! Ces types avaient des robots géants !?
- Primitifs, bien sûr, ils n'auraient sans doute pas fait le poids face à Mazinger Z, l'Eva-01 ou même Aphrodite A... Mais oui, il s'agissait bien de robots géants. Nous étions face aux derniers restes d'une civilisation qui disposait d'une technologie bien plus évoluée que celle auquel avait accès le reste de l'humanité à cette époque.
- Bon Dieu... Murmura Date. Comment une telle information a-t-elle pu rester secrète ?
- La révélation aurait été beaucoup trop dangereuse. N'oubliez pas que cela s'était produit durant les troubles qui suivirent le Second Impact... La Troisième Guerre Mondiale menaçait d'éclater à tout instant. Alors révéler l'existence d'une technologie de guerre ancienne pouvant facilement être adaptée à un usage moderne aurait fait l'effet de donner une allumette à une bande de pyromanes se tenant dans un lac d'essence.
- Il y a quelque chose que je ne comprends pas, cependant, dit Kyriu. Avec une telle technologie, les habitants de Bardos était en avance de plusieurs siècles sur leurs voisins d'un point de vue militaire... Alors comment se fait-il que l'on n'en connaisse pas l'existence ?
- Parce que ces machines n'ont pas été construites dans un but de conquête, mais de protection.
- Contre quoi ?
- Les Anges. »

Le choc fut général. Au point que même Kyriu sembla en perdre son stoïcisme.

« - Ils connaissaient leur existence ?! Cria-t-il presque.
- Nous avons trouvé de multiples fresques et fragments de parchemin qui nous ont permis de rétablir l'histoire de l'île. Il y a des milliers d'années, les habitants de Bardos étaient de simples bergers, mais un jour, l'un des Anges leur est apparu. Il ne les a pas attaqué, étrangement, mais en revanche, il s'est insinué dans leur esprit pour leur révéler ce qu'ils ont appelés le Grand Secret et leur montrer ce que ses semblables allaient leur infliger.
- Grand Secret ? Dit Date.
- Nous ignorons de quoi il peut bien s'agir... Les documents étaient fragmentaires, et il semblait de toute manière que parler du Grand Secret était devenu un interdit religieux sur l'île, à en juger par l'évocation des châtiments infligés à ceux qui osaient en parler. Quoi que cela soit, ça avait en tout cas choqué les habitants de Bardos et semblait être sujet d'une grande honte pour eux. En tout cas, les visions de l'Ange ont terrifié ces hommes, mais leur a également permis d'accéder à un niveau de conscience qui leur a permis de développer ces technologies. Il ne craignait plus qu'une chose désormais, c'était que les Anges reviennent sur Terre et commencent à massacrer pour de bon toute forme de vie. Sachant qu'ils viendraient des cieux, ils se sont alors réfugiés sous terre, puis ont construits des machines vivantes, sensées combattre les Anges et les protéger lorsque ceux-ci reviendraient.
- Ils n'ont pas essayé de prévenir le reste de l'humanité ? Demanda Kouji.
- Pour des raisons inconnues, ils avaient perdu toute confiance en leurs contemporains, et se considéraient désormais, en leur qualité d'illuminés, comme les seuls méritant de survivre au retour des Anges.
- Et comment ont-ils disparus ?
- Aucune idée... La seule piste que nous ayons est que les conditions de vie souterraines ne se révélèrent pas aussi idéales que ce qu'ils espéraient, et qu'une intoxication alimentaire généralisée a entraîné leur dégénérescence. C'est tout ce que nous avons pu conclure à partir des quelques voyages que nous avons pu effectuer sur l'île. »

Kyriu semblait reprendre le fil de ses pensées. Date, lui, se contenta de fixer le jeune agent d'un air énigmatique. Le suspectait-il d'être depuis longtemps au courant de ces informations, c'était fort possible, bien que son attitude semblait dire le contraire.

« - En tous les cas, reprit le docteur Yumi, si cela eut un fort impact sur nous, ce n'était rien comparé à la folie qui prit le docteur Hell... Il agissait déjà de manière particulièrement étrange, mais son attitude empirait au fur et à mesure de nos découvertes. Il devenait de plus en plus excité avec le résultat de nos recherches, mais dans le même temps il manifestait une agressivité de plus en plus prononcée à notre égard. Il déclarait que nous gâcherions les avancées que nous pourrions faire avec ces découvertes, que lui seul pouvait vraiment envisager l'envergure réelle de ses applications... Hikari et le professeur Kabuto eurent plusieurs mots avec lui, de plus en plus violents, et il devenait impossible de travailler avec lui. Il semblait décidé à garder pour lui plusieurs informations des ruines de Bardos... Et, de fait, Hikari était sur le point de le renvoyer quand l'accident se produisit...
- De quel accident parlez vous ? Demanda Date.
- Un soir, le professeur Kabuto, Gendo Hikari et moi-même compulsions nos notes lorsque le sol se mit à trembler... Et soudainement le sol de l'île toute entière commença à s'affaisser. Nous réussimes à rassembler tout le matériel et les hommes que nous purent pour évacuer, mais une bonne partie de notre équipement disparut cette nuit-là... Et plusieurs ouvriers ne réussirent pas à atteindre les bâteaux à temps. En quelques minutes, l'île de Bardos s'effondra sur elle-même, rendant complètement impossible toute exploration future de la civilisation de Bardos. Quand au docteur Hell, il ne faisait pas partie des survivants...
- Mais vous supposez qu'il était à l'origine de ce désastre... » Déclara l'agent Kyriu.

Gennosuke opina, convaincu qu'il était de la culpabilité du scientifique fou.

« - Un des ouvriers nous a avoué qu'il avait vu le docteur Hell pénétrer dans la grotte menant à la cité souterraine quelques minutes avant l'effondrement de l'île, en portant avec lui plusieurs papiers. Impossible de savoir ce qui s'était réellement passé, mais notre conviction était que le docteur Hell avait découvert quelque chose dans les ruines qu'il nous avait caché et qu'il avait essayé d'activer. Si cette civilisation avait pu construire des milliers d'années en avance des robots géants, qu'est-ce qui nous dit qu'elle n'avait pas fabriqué pire ? En tous les cas, nous étions convaincu qu'il était mort dans la catastrophe. Etant donné l'impossibilité de pouvoir trouver une application concrète à nos découvertes, les machines de Bardos ayant sombré avec le reste de l'île, toute l'affaire fut finalement étouffée, et la NERV mit un terme aux recherches. Par la suite, le professeur Kabuto et moi-même, nous regagnèrent l'Institut, et c'est peu de temps après que le projet Mazinger fut lancé.
- Il y a un point sur lequel vous vous êtes bien plantés, en tout cas, dit Kouji. Le docteur Hell n'est certainement pas mort...
- Il reste possible que ce soit un autre individu ayant repris son nom, mais... J'en doute, dit l'agent Kyriu. Votre récit confirme nos pires soupçons, docteur. A partir d'aujourd'hui, vous serez sous la protection des services spéciaux japonais, au cas...
- Je n'ai pas besoin de protection ! Cria brutalement Kouji. Si jamais ce pourri m'envoie un de ses larbins, je vous jure qu'il s'en prendra plein la face ! Et après, je retrouverai ce foutu maniaque et je lui ferais payer la mort de mon grand-père ! »

L'éclat du jeune homme avait visiblement pris au dépourvu l'agent spécial et le docteur Yumi, qui le regardèrent avec de grands yeux écarquillés ; mais le commissaire Date, lui resta impassible. Il avait certainement vécu ce genre de situations plusieurs fois, et il savait à l'avance comment réagir.

« Très courageux de votre part... Et très stupide. Nous ne parlons pas d'un simple caïd de centre-ville. Ce docteur Hell, à supposer qu'il s'agisse du même que celui qu'a rencontré le docteur Yumi, n'est certainement pas sorti de ce cataclysme les mains vides ; si lui a survécu, peut-être a-t-il pu récupérer des fragments de la technologie de Bardos. Et surtout, il n'est pas seul. Prions pour que Setsuki ait été le seul acolyte qu'il avait à ses côtés, mais si ce n'est pas le cas, alors il faudra compter sur la présence de plusieurs autres fanatiques prêts à tuer pour leur maître et à se faire sauter si l'occasion se présente. »

Le commissaire Date se pencha vers Kouji et le regarda dans les yeux.

« Monsieur Kabuto... Si j'étais vous, j'accepterais toute protection disponible. »


A des centaines de kilomètres de là, le baron Ashura se tenait appuyé contre une rambarde de sécurité surplombant une salle de production dont les dimensions se comptaient en centaines de mètres. A ses côtés, la tête du comte Brocken flottait maintenue dans les airs par un dispositif anti-gravitationnel inventé par le docteur Hell. Les deux commandants du scientifique dément observait le fruit d'années de travail en train d'être achevés.

« - Je vois que vous avez accéléré la cadence, Ashura, dit le comte. Ce qui, à vrai dire, n'est pas franchement de trop vu le peu de résultat que vous avez eu jusqu'à présent...
- Je fais de mon mieux pour servir notre maître, répliqua l'être androgyne. Par contre, vous êtes mal placé pour critiquer mon travail, vu votre incapacité à respecter les objectifs du docteur. »

Brocken pivota pour jeter un regard assassin à son rival. Un groupe de séides qui passait par là ne releva même pas la tension entre les deux êtres. Leur haine réciproque était tellement connue au sein de l'armée de Hell qu'elle ne surprenait plus personne.

« - Cessez ce petit jeu, Ashura ! Je sais parfaitement que vous avez saboté le travail des hommes à ma disposition pour me faire passer pour un incapable !
- Je n'ai pas besoin de vous faire passer pour ce que vous êtes ! Répliqua Ashura sur un ton violent. Et ne parlez pas de sabotage alors qu'en fait, vous n'êtes pas fichu de suivre ses directives !
- Vous n'êtes qu'un traître ! Vous mériteriez que...
- Silence. »

L'ordre qui venait d'être prononcé eut un effet immédiat. Les deux commandants se tournèrent immédiatement, leur haine se muant instantanément en peur. Face à eux se tenait leur maître, avec un regard empli de reproches. L'aura qu'il dégageait glaça le sang de ces deux êtres cruels. Seul lui était capable, avec seulement un regard, de produire un tel effet sur eux.

« Je ne tolérerais aucune rivalité entre mes généraux si celle-ci peut contrecarrer nos plans, prononça le docteur Hell d'un ton glacial. Je n'ai pas fait de vous des êtres supérieurs pour que vous vous entretuiez dans des rixes aussi vaines, alors que nous ne sommes plus qu'à quelques semaines du triomphe. »

Le docteur Hell se plaça entre ses deux commandants, les abandonnant pour observer son oeuvre. Instinctivement, tous deux s'écartèrent non seulement pour lui faire de la place, mais également pour agrandir la distance entre lui et eux.

« Sont-ils achevés ? »

Le baron Ashura avala brièvement sa salive avant de répondre.

« Oui, maître. De même que leur programmation. Ils sont prêts à être envoyés à l'assaut. »

Un rictus glacial se dessina sur les lèvres du scientifique dément. Enfin. Le moment était venu pour le monde de trembler à l'évocation de son nom.

« Alors, faites-le. Que Garuda et Doublas soient mes hérauts. »





A SUIVRE

Je suis captivée par ta fiction. Elle est trop bien !!!


J'ai adoré la réaction de Boss quand il est vexé d'avoir été sauvé par une fille, l'embarras de Shinji face à Rei, la réaction de Kouji au commissariat. En fait, j'aime tout, tout, tout, absolument tout !!!

En plus, c'est très bien écrit, très agréable à lire.

Bravo !!!

Le chapitre 6 avance trèèèèèèèèès lentement (ben ouais, boulot, tout ça...). Alors entre deux, je m'amuse à imaginer le générique qui collerait à ce récit...

Alors, globalement, il faudrait reprendre le générique d'Evangelion, les paroles collant aussi bien pour Shinji que pour Kouji. Ça, et je n'ai pas les compétences musicales requises pour créer un tout nouveau générique ! Pour ceux qui n'ont jamais vu le générique d'Evangelion, un rapide tour sur youtube suffira pour le trouver. Donc, en restant calé avec la chanson :

Zankoku na tenshi no you ni
Shônen yo shinwa ni nare !
=> Début identique, sauf qu'aux symboles cabalistiques s'ajoutent d'autres liés à l'univers de Mazinger Z : des schémas du robot, un Z géant, et si ça existe dans la série originale (pour ça, ma connaissance me fait défaut) un symbole de Bardos ou du Dr Hell.

Break musical ; apparition du titre : Nekketsu Genesis Mazingelion

Aoi kaze ga ima
Mune no doa wo tataitemo
watashi dake wo tada mitsumete
hohoenderu anata
=> Soleil couchant, paysage désertique ; une silhouette se découpe à l'horizon. Zoom : c'est Kouji, dans sa tenue de pilotage, marchant vers la caméra. Le pilote de Mazinger Z retire son casque, puis regarde vers l'un des côtés du cadre. La caméra s'envole pour suivre l'endroit qu'il regarde...

Sotto fueru mono
motomeru koto ni muchû de
=>... Et on découvre Shinji, roulé sur lui-même. Le garçon relève lentement la tête, l'air abattu.

unmei sae mada shiranai
=> Quelqu'un pose sa main sur l'épaule de Shinji. Celui-ci se tourne, et on voit qu'il s'agit de Kouji, qui lui sourit avec un air de défi. Shinji lui sourit à son tour...

itaikena hitomi
=>... Puis se redresse, tandis que la caméra dézoome pour révéler que les deux garçons se tiennent sur une plate-forme entre les têtes de Mazinger Z et de l'Eva-01.

dakedo itsuka kitsuku deshô
sono senaka ni wa
=> Montage en split-screen montrant d'une part l'Entry-Plug de Shinji entrer dans l'Eva et d'autre part l'Hoverpilder s'insérant dans le crâne de Mazinger Z. Apparaissent brièvement et avec un très court fondu Misato, le docteur Yumi, Ritsuko et Sayaka.

haruka mirai mezasu tame no
hane ga aru koto
=> A nouveau split-screen montrant les deux machines en train de s'activer, de s'agiter, puis fusion des deux "écrans" pour les montrer côte à côte, en position de combat.

zankoku na tenshi no têze
madobe kara yagate tobidatsu
hotobashiru atsui patosu de
omoide wo uragiru nara
=> Dans le générique d'Evangelion, cette partie était une orgie de plans très courts de l'Eva, des divers personnages impliqués, et de quelques fragments de textes importants. Ben là, pareil : se succéderont très vite des plans des deux machines en action (rocket punch, attaque au progknife...), des personnages importants (Rei, Asuka, Boss, Gendo Ikari, Dr Hell, Baron Ashura, plus quelques uns que je ne révèlerait pas ici, parce que sinon je me spoilerais), et quelques noms (parmi lesquels "NERV", "EVA-00", "EVA-02", "APHRODITE A", "PHOTONIC RESEARCH INSTITUTE", "BARDOS ISLAND", "ANGELS", "MECHABEASTS"...).

kono sora wa daite kagayaku
=> Au premier plan, l'Eva-01 et Mazinger Z. Et face à eux, semblant jaillir de terre, un Ange énorme, bien plus gros qu'eux, accompagné de Garuda et de Doublas, tous deux presque aussi gros que l'Ange.

shônen yo shinwa ni nare !
=> Les deux robots se jettent un regard vite fait, les visages de leurs pilotes respectifs semblant apparaître en surimpression... Puis se jettent sur leurs adversaires, l'image ralentissant et se figeant alors qu'ils sont sur le point de porter le premier coup.

purplefish a écrit:

un symbole de Bardos ou du Dr Hell.

Que veux-tu dire par là ? un genre de logo ? Ou alors quelque chose qui caractérise le Dr Hell ? Il a une sorte de trident (le sceptre de Rodos en VF) qui lance des rayons mais Ashura s'en sert aussi. Cela leur sert, entre autres, à commander les bêtes mécaniques.

En tout cas, je trouve l'idée d'un générique excellente ! Et la description que tu nous en donnes me plaît.



Alcorine

Alcorine a écrit:

purplefish a écrit:

un symbole de Bardos ou du Dr Hell.

Que veux-tu dire par là ? un genre de logo ? Ou alors quelque chose qui caractérise le Dr Hell ? Il a une sorte de trident (le sceptre de Rodos en VF) qui lance des rayons mais Ashura s'en sert aussi. Cela leur sert, entre autres, à commander les bêtes mécaniques.

Ça pourrait convenir, oui... A condition qu'ils l'arborent comme symbole, ou comme bannière sous laquelle ils rassemblent leurs troupes. En tout cas merci de participer !

purplefish a écrit:

Ça pourrait convenir, oui... A condition qu'ils l'arborent comme symbole, ou comme bannière sous laquelle ils rassemblent leurs troupes.

Alors, je ne suis pas sure que cela convienne. Je vais y réfléchir.

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Purplefish, je ne t'oublie pas. Je parcours les épisodes de Mazinger Z pour voir si je trouve quelque chose. Pour l'instant, à part le trident, je n'ai rien trouvé. Je te tiens au courant.

Je voudrais savoir s'il est possible de te laisser des commentaires sur le site où se trouve ta fiction. Si oui, je n'ai pas trouvé comment faire. (C'est pour une personne qui n'est pas membre ce ce forum.)

Alcorine

Alcorine a écrit:

Purplefish, je ne t'oublie pas. Je parcours les épisodes de Mazinger Z pour voir si je trouve quelque chose. Pour l'instant, à part le trident, je n'ai rien trouvé. Je te tiens au courant.

Oh, tu sais, c'est pas non plus comme si j'essayais de le faire dans la journée, hein...

Alcorine a écrit:

Je voudrais savoir s'il est possible de te laisser des commentaires sur le site où se trouve ta fiction. Si oui, je n'ai pas trouvé comment faire. (C'est pour une personne qui n'est pas membre ce ce forum.)

Normalement, oui, il y a une fonction review... Elle est tout en bas de la page d'un chapitre ("review this story/chapter").

Oui, mais voilà ce que ça répond :

"Anonymous Reviews DisabledThis author does not accept anonymous reviews. Please login and come back to submit a signed review."

Il faut forcément ouvrir un compte pour mettre des commentaires ?

Ah, ben écoute, on dirait... Je vais voir si de mon côté je peux débloquer le truc.

Edit : C'est bon c'est réglé, j'avais pas vu, mais il faut en effet spécifier quand on poste une fic si on accepte les commentaires anonymes ou pas. Il peut poster quand il veut maintenant.